Thursday, March 29, 2007

Quand Falardeau rencontre Loco Locass

Pour mes amis d'ailleurs :


Pierre Falardeau est un réalisateur Québécois, connu pour les mauvaises raisons : la cigarette, la colère et les sacres (jurons), mais pas pour les bonnes choses : sa critique intelligente de la société Québécoise et Canadienne (le personnage d'Elvis Gratton en est la preuve. Mais aussi le court métrage "le temps des bouffons"...); son engagement pour toutes sortes de causes : La Palestine (ici), la souveraineté du Québec; son soulèvement contre d'autres choses ignobles : L'impérialisme Américain, le cannibalisme capitaliste, etc. Pierre Falardeau est une personne qui gagne à être connue.



Loco Locass est un groupe de trois "rappeurs", qui aiment jongler avec les mots et parlent souvent de la souveraineté du Québec.



Mahmoud Darwich est un grand personnage : Palestinien de naissance et de coeur. Résistant de la plume et des vers. Il n'a jamais cessé de se battre pour la paix en Palestine.

Quand j'ai écouté ce "discours" accompagné de la musique Loco Locassienne, j'ai vibré. Et je me suis dit que oui, il existe des gens merveilleux, qui sont capables de s'impliquer et de se mouiller pour un avenir meilleur.

Yallah






Oui, oui. Je sais. Je vous avais promis une chronique sur la propension exagérée des phoques à parler pendant leur sommeil. Mais, vous en conviendrez, ça n'urge point.

Ah, oui, une dernière chose : Amis d'ailleurs, ne faites pas un Ardisson de vous. Ne venez pas me dire que vous ne comprenez rien. Forcez-vous un peu :) (Mais si vous me le dites, je comprendrais : je ne comprenais pas grand-chose au début, moi non plus :()

Merci à C. pour ce trésor artistique et humain.


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Wednesday, March 28, 2007

J'ai quelques sujets comme ça

J'ai quelques sujets qui me tiennent à coeur. Quand j'en parle, j'ai le coeur qui bat fort. Je deviens rouge. Et je parle. Je ne le fais pas exprès. Je vis le sujet. Je le vis. Je le respire. Je le sens. Ce n'est plus le moi posé et timide. C'est le moi vivant et passionné. Parfois même, je m'emporte. Je m'énerve. Je suis hors de moi. Puis ça passe. Et je me calme.

J'ai quelques sujets comme ça.



La Palestine en est un. Certains me discréditent tout de suite : tu es arabe. Tu n'es pas objectif. Je suis presque d'accord. Presque. Car oui, je suis arabe. Du moins arabophone. La définition d'arabe étant un peu compliqué. Mais je ne ferai pas un Omar Aktouf de moi (dans une entrevue avec Foglia, il y a quelques années, répondant à sa première question "Alors, vous êtes Algérien ?", celui-ci aurait répondu "Non. Je suis Kabyle". Ceux qui connaissent Foglia auront deviné qu'il n'a pas raté ce pauvre Aktouf). Oui, je suis arabe. Dans le sens large du terme. Oui, ma langue maternelle est un dialecte de racine arabe (darija), truffé de mots français, espagnols et berbères. Passons à la deuxième affirmation : tu n'es pas objectif. Oui. Je ne suis pas objectif. La question est : qui l'est ? L'objectivité, existe-t-elle ? Est-ce qu'un Chinois peut être objectif quand il parle de l'horreur que les Japonais ont fait vivre aux Chinois ? Est-ce qu'un Japonais peut être objectif, quand il affirme que le Japon n'a rien fait à la Chine ? Et même quand il affirme le contraire et se veut objectif, l'est-il pour autant ? N'est-il pas poussé par cette rigueur qui le force à essayer d'être objectif, et par le fait même, fait en sorte qu'il ne l'est plus ? C'est une question philosophique. Je sais. Mais c'est une question éternelle. Éternelle et sans réponse. Alors, oui, peut-être que je ne suis pas objectif.

Cependant.

Cependant.

Je suis PRESQUE d'accord.

J'ai des objections votre honneur.

Primo, je ne fais pas partie de ceux qui nient l'existence d'Israël. C'est trop tard. Ils sont là. C'est fait. Il faut faire avec. Vous savez. La paix. La colombe blanche. Les mains qui se serrent. Toutes ces histoires. Oui. J'y crois. Enfin, je voudrais que ça arrive. Je le voudrais tellement.

Deusio, ç'aurait été le Chili que ça m'aurait énervé, cette histoire. Je veux dire. Une haine. Une deuxième guerre mondiale pleine d'horreurs. Un sentiment de culpabilité envers les juifs. Que fait-on ? On leur donne un bout de terre. Pour réparer l'injustice. Pour se sentir mieux. Moins coupables. Et alors ? Bein, c'est bien tout ça. C'est plein de bon sens. Sauf que...Sur ce bout de terre, vivait déjà un peuple. Depuis longtemps. Avec une histoire. Une culture. Une langue. Commence un long combat. Qui n'est toujours pas fini. Mais un combat injuste. Comme tous les combats, d'ailleurs. David et Goliath. Une armée des plus fortes au monde. Et des pauvres gens avec des pierres. Et puis, le terrorisme. Des bombes. Des suicides. Mais qu'est-ce que le terrorisme ? Quand Israël détruit des maisons (avec ses habitants), n'est-ce pas du terrorisme ? Quand on bombarde des populations entières, n'est-ce pas du terrorisme ? Et puis, je ne veux pas vous la jouer sentimental. Je ne veux pas vous écrire "enfants, femmes et vieux inclus". Pourquoi ? Parce que je m'en fous de ces histoires de vieux, d'enfants et de femmes. Un être humain est un être humain. Avec des droits. Peu importe son sexe et son âge. Il a des droits. Le droit à la dignité. Le droit au respect. Le droit à la vie, tout court. Pourquoi un Palestinien doit-il subir des humiliations chaque jour pour aller d'une ville à une autre ? Surtout qu'il est chez lui ? Pourquoi ? Au nom de quelle justice ? Pourquoi vivent-ils dans la misère, sans eau, sans accès aux choses élémentaires de la vie, à côté de riches secteurs juifs, protégés et prospères ? Au nom de quelle règle fait-on tout cela ? Y en a-t-il une, d'ailleurs ? S'il y en a une, dites-le moi. J'aimerais le savoir.

Tercio. Je m'en tiens aux faits. Voici ce que j'ai lu ce matin sur La Presse, dans un article titré "Le Canada refuse de recevoir un ministre Palestinien" : Le Canada avait été le premier pays, avant même les États-Unis, à suspendre en mars 2006 son aide financière. Ottawa avait annoncé à l'époque la suspension de son aide et de tout contact avec le gouvernement du Hamas, tant que le mouvement radical palestinien n'aurait pas renoncé à la violence et reconnu Israël.

Dites-moi une chose : est-ce qu'Israël a reconnu la Palestine ? Est-ce qu'Israël a renoncé à la violence ? Rappelez-vous ce qui s'est passé au Liban cet été. Rappelez-vous de la déclaration de Harper : "Une réponse mesurée". Mesurée ! Non, mais. On bombarde des villes, un aéroport, des autoroutes. Et on appelle ça, mesuré ! Prenez le dictionnaire Mr Harper, mesuré : Qui témoigne de modération, de retenue. Je n'ai vu aucune modération cet été, moi. Je n'en ai même jamais vu, concernant Israël.

Parce que fort d'un lobby puissant, parce que soutenu par les États-Unis (et les deux choses sont liées), et donc par le Canada (depuis qu'on a un gouvernement conservateur pro-Bush), parce qu'il sort à chaque bout de champs la carte "si vous me critiquez, vous êtes antisémites", parce que les médias sont extrêmement biaisés (toujours à cause du même lobby) Israël continue à jouer aux cowboys dans ce monde.
Sans loi. Mais avec une foi. Sans loi. Mais avec une foi. La foi que les Palestiniens ne valent rien. Qu'ils sont moins que des êtres humains. La foi que cette terre leur appartient. Ils en ont la preuve : C'est écrit. Et ils feraient tout pour la récupérer. La foi qu'avec la force, on gagne.

Avec la force, on ne gagne pas. On perd. Parce que l'injustice crée des fous. Et les fous font mal. Ils font mal à tout le monde. À eux. Aux autres. Et les autres, c'est nous. Et nous n'en voulons pas. Nous ne voulons pas de morts. Nous ne voulons pas de sang. Nous ne voulons pas de fous. Nous ne voulons pas deux poids, deux mesures.Nous voulons la paix.

Nous voulons la paix.

Je veux la paix.

La Palestine a le droit d'exister.

L'injustice doit arrêter.


Si on demande à La Palestine de reconnaître Israël, il faudrait demander aussi à Israël de reconnaître La Palestine.


J'ai quelques sujets comme ça.

Mais rassurez-vous. Je n'en parlerai pas tout le temps.

Le prochain texte traitera de la propension exagérée des phoques à parler pendant leur sommeil.


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Monday, March 26, 2007

Au secours

21h 10. Si la tendance se maintient, chères immigrantes, chers immigrants, c'est le début d'un long périple !

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Thursday, March 22, 2007

Une dernière excentricité avant Morphée

J'ai promis à A. de lui prêter ce roman que j'adore : "La conjuration des imbéciles". Comment ne pas l'oublier demain matin en m'en allant au travail ? Je le mets sur la poignée de la porte. En équilibre. Je sais pourtant pertinemment qu'il risque de tomber en pleine nuit. Ça me fait sourire. L'idée romantique qu'un bruit brusque résultant de la tombée soudaine de ce chef-d'oeuvre de la littérature me réveillera en pleine nuit d'été me séduit joyeusement.

Comment ai-je fait pour écrire une phrase aussi longue ? Et sans une seule virgule en plus !

Bon allez hop, dans les bras de Morphée.

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Wednesday, March 21, 2007

Une marche vaut mille mots

J’ai voulu faire un tour au YMCA. Puis j’ai eu la flemme. Puis je me suis découragé. Encore des poids. Encore des fous qui veulent être en forme. Encore des miroirs témoins de nos débilités humaines. Tout ça de l’université. Tout ça dans ma petite tête. J’ai voulu et je n’ai plus voulu. Tout seul. Comme ça. En descendant, je me suis décidé à mettre le nez dehors. Fait-il froid ? Pas vraiment. C’est supportable. Quelques degrés en deçà du zéro. J’ai déjà vu pire dans mon cher beau Québec. Marchons alors. Marchons jusqu’à la maison. Je n’habite pas à côté. Mais pas à 20 kilomètres non plus. Ça me prendra 40 – 45 minutes. J’aurais fait mon sport. Et je me baladerai un peu. J’aime marcher. Ça me relaxe. À quelques coins de rue, une épicerie indienne. Ils font un truc végétarien à 65 cents que j’aime bien. Je ne sais comment ça s’appelle. Je sais ce que ça goûte par contre. J’aime bien. Bien sûr, les épices vous sautent au nez. Je rentre et j’en achète deux. Que je mange en marchant sur la rue Ontario. Qui est tantôt sombre, tantôt égayée par quelques lumières courageuses. Je marche et je mâche. Et je regarde les gens. Nous sommes de foutus spécimens. Un grand homme – car plus grand que moi – parle à une petite dame – car plus petite que moi – à grands gestes longs devant le Cégep du Vieux Montréal. Ils discutent calmement. Et deux autres amis les attendent calmement aussi. Je les dépasse. Je me demande de quoi ils parlent. Je crois qu’ils parlent le langage des signes. Une autre langue que j’aimerais apprendre. Quand j’aurai le temps. Quand j’irai me terrer dans un trou loin de tout le monde. Parmi les écureuils et les arbres silencieux. C'est avec l'arbre que je me pratiquerai. Je marche toujours. J’en suis arrivé au deuxième machin-chouette indien. C’est bon. Je ne sais même pas ce qu’il y a dedans. En fait, je savoure les épices. Je suis un être superficiel. C’est la forme qui importe. Le contenu importe peu. Sur la rue St-Denis, les gens sont pressés. Personne ne prend son temps. Tout le monde a un rendez-vous quelque part avec quelqu’un d’autre. Je traverse la rue. Je presse le pas aussi. Ce n’est pas le moment de flâner. On va me bousculer. Rue Berri. La piste cyclable est presque déserte. Dans quelques semaines, le soleil. Et les vélos. Et la vie. Je suis sûr que Montréal double de population entre l’hiver et le printemps. Comment ? Bein, il y a des gens qui ne sortent pas de l’hiver. Ou rarement. Quand tout le monde montre son museau le premier jour de vrai printemps, ça fait un drôle d’effet. On se demande toujours : mais d’où sortent-ils tous ? De chez eux. Des souterrains. De la Floride. Il y a toutes sortes de réponses à cette question sans importance mais ô que capitale. Quand j’arrive au bouquiniste de la rue Ontario (dont le nom contient le mot « trésor », mais qui m’échappe en ce moment), j’ai l’envie soudaine d’y faire un tour. Je vois le libraire dedans, en train de discuter avec deux personnes. J’essaye d’ouvrir la porte. Elle est verrouillée. Il est tard. C’est une discussion privée. Qui sait quel livre j’aurais rencontré ce soir ? Qui sait quel chef-d’œuvre j’aurais découvert ? Je continue mon chemin. Sur la vitrine d’un petit restaurant, j’aperçois l’annonce suivante « Tourtière du Lac St-Jean ». C’est peut-être bon. Mais comment ferai-je la différence entre une tourtière du Lac St-Jean et une tourtière de Chicoutimi ? Moi, qui n’ai jamais mis les pieds ni au Lac, ni à Chicoutimi. Comment ferai-je la distinction ? Encore une annonce attrape-nigaud. Enfin, attrape-touriste. Je passe mon tour. Peut-être un jour. Je dépasse la rue Papineau. Le pont est au bout. Les voitures hurlent. La cacophonie règne. Je me faufile et je traverse. Je suis bientôt arrivé. Encore une quinzaine de minutes. Encore quelques rues et une pente. Je prends la rue parallèle à la mienne. Il n’y a pas de dépanneurs. Pas de magasins. C’est le calme. C’est le noir. C’est l’anonymat. Je pense à tous ces gens chez eux, en train de dîner, en train de regarder la télé. Le Canadien joue-t-il ce soir ? Que disent les nouvelles ? Sûrement des anciennetés. Je pense à toutes ces familles unies et à toutes celles éparpillées. À travers le monde. À travers la ville. À coups de divorces et d’exils. Un seul scénariste a écrit toutes ces histoires. Nous expliquera-t-il un jour ? Le pourquoi ? Le comment ? La raison d’être et de ne pas être ? Je nous le souhaite. Je me le souhaite.

Quand j’arrive chez moi, trois lettres impersonnelles m’attendent. Il est presque 21h. J’ai laissé une lumière allumée. Et c'est la dépression et le regret. Je n’ai pas mal pour la facture d’électricité. J’ai mal pour l’énergie gaspillée. J’ai mal pour les millions de gens à travers le monde qui n’ont pas cette électricité. Et moi, je l’oublie (!) allumée. Les autres n’ont pas ce luxe d’oublier. Les autres n’ont même pas de luxe. Ils ont moins que le nécessaire. Et ils vivent. Alors que je survis.

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Ochenta años de literatura



Je me suis d'abord essayé à "La mala hora". Il m'est tombé des mains. J'ai ensuite fini "Chronique d'une mort annoncée". Bof. Tout juste acceptable, pas plus. Puis j'ai lu "Cent ans de solitude". Je suis resté sans voix. Quelle plume ! Quelle imagination ! Quel verbe ! Depuis, je passe souvent devant "L'amour au temps du choléra" (sur ma table de salon) et j'hésite. Parce que je risque d'être déçu. Parce qu'il est difficile de faire mieux que "Cent ans de solitude". Mais, bon, un jour...



Cette année, Gabriel García Márquez fête ses 80 ans (C'est déjà fait...). En Espagne, on réédite son chef-d'oeuvre, chose qu'on a fait à un seul autre livre : "Don Quichotte De La Mancha". C'est peu dire...

Si vous n'avez pas encore lu "Cent ans de solitude", je vous y encourage grandement...

(PS : Si vous voulez comprendre le pourquoi de l'oeil au beurre noir de Márquez sur la photo, je vous invite à consulter cette adresse : http://passouline.blog.lemonde.fr/ à la date du 19 Mars 2007.)

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Les handicapés ne sont pas ceux qu'on croit

Vendredi soir. Un resto sur St-Laurent. Pas St-Laurent, centre-ville. Non. St-Laureeeennnnt. Il commence à faire froid. Une tempête ce soir. Une quinzaine de centimètres de neige. Une vraie tempête. On descend de la voiture. Pauline Marois marche en avant. Met de la monnaie dans le parcomètre. C’est K. qui l’a vue. Va-t-elle au même restaurant que nous ? Probablement. On entre. Pauline est effectivement là. On paye. Les manteaux dans le vestiaire. Le comité d’accueil est là. Je reconnais A. A. est en chaise roulante maintenant. Il était client dans le resto où j’ai travaillé pendant tout le long de mon bac. Autrefois, A. fut un homme important, heureux, un homme qui a réussi. Puis, il fit un accident. Et le voilà aujourd’hui, président de cette association qui vient en aide aux handicapés du Maroc. Oui, oui, j’avais oublié : A. est Marocain. Entre vous et moi, ça change quoi ? Il est en chaise roulante. Il trime. Et il veut aider les autres qui triment comme lui. Alors, Marocain ou Mexicain, qu’est-ce que ça peut bien changer ? On entre. Dans une des tables, un militaire en uniforme. Beaucoup de médailles. Grand. Moustachu. Souriant. Confiant. Comme seuls les militaires décorés peuvent l’être. Ses voisins ? Des gens en cravate. Des femmes maquillées jusqu’aux oreilles. Et Pauline. Ah, Pauline, si tu savais comment tu nous manques dans cette campagne électorale ! Si tu savais. Ils sont blasés, populistes ou pissou *. Je suis sûr que la femme froide, réservée et mûre que tu es, aurait pu faire une différence dans cette campagne. Je suis sûr que tu y aurais mis du piquant. C’est d’un ennui, Pauline. Mais d’un ennui. Pourtant, je sais tes lacunes. Pourtant, on sait tous que tu ne sais pas parler au peuple. Mais justement, le peuple, il a Dumont. Et les autres, ils font quoi ? Ils votent par dépit ? Pauline, je te le dis en toute sincérité. Tu nous manques dans cette campagne morose, terne, sans goût. Mais la vie est ce qu’elle est. Il faut faire avec.

Je me commande un café. Je suis debout depuis 6h 30. Et j’ai du mal à rester éveillé. Réveille-toi. La nuit est encore jeune. J’avale le café. Et je ne bois presque jamais de café. Nous parlons. Avec K. Avec F. Un vaillant avocat de Winnipeg qui s’est marié avec une Marocaine. Un gars intéressant. Un bon Jack. Il vient de rejoindre l’association. Il y a peu de temps. Il a fière allure. On discute. De tout et de rien. Puis, il file. Le devoir l’appelle. Abd. arrive. Abd. est un ancien communiste marocain. Est-on jamais un ancien communiste ? Je crois qu’on le reste un peu à vie. Sa première question quand on lui a demandé de venir au souper-levée de fonds ? Est-ce que ça va parler du Roi ? Est-ce qu’il y aura des lécheurs de cul, comme d’habitude ? Non, non, Abd. Viens. Ne t’inquiète pas.

Il avait raison de s’inquiéter. Et on s’en rendit compte très tôt. Un journaliste (je le sus plus tard) prend le micro et fait les présentations. Voilà qu’il salue Madame la consule du Maroc au Canada. Voilà qu’il salue monsieur l’ambassadeur. En fait, je crois que je vous raconte des histoires. Je ne sais si c’est la consul et l’ambassadeur, l’ambassadrice et le consul, la belle et la bête, le bête et la belle,etc… Je n’en sais rien. Je sais seulement qu’il a salué quelques Marocains représentants du Roi au Canada. Je n’en sais rien, parce que je ne veux pas le savoir. Je suis venu pour les handicapés, moi. Pas pour des niaiseux en cravates. Pas pour des maquillées comme un arbre de Noël. Je suis venu pour une cause. Maintenant, Pauline prend le micro. Elle parle sobrement et sans exagérations. Et passe le micro au prochain. On se congratule. On souligne les cinq années de l’organisation et ses accomplissements. Et on appelle le Colonel et ses médailles au micro. Je ne comprends pas au début. Puis ça clique. Enfin, on me le fait cliquer. Le ministère de la défense sponsorise l’association. Parce que, A. (le président de l’association) travaillait pour ce ministère. Et machin-chouette en tenue militaire était son boss. Voilà qu’on parle de l’armée canadienne. Voilà qu’on justifie la présence du Canada en Afghanistan. Pincez-moi quelqu’un ! Je rêve. On vient parler d’handicapés. Et on nous parle de l’Afghanistan. C’est parce que…la guerre, ça fait des handicapés. Et le Canada n’est plus en « casques bleus » en Afghanistan. C’est parce que sponsoriser les handicapés pour promouvoir la guerre, c’est pas fort. C’est parce que tout ça est dégoûtant et plein de mauvais goût. Nous rions jaune. Nous sommes ébahis devant la connerie humaine. Le consul ou ambassadeur, prend le micro. Voilà qu’il parle des musulmanes. Voilà qu’il parle du voile et de la femme du prophète. Je vais aux toilettes. Je vais pisser en pensant que ces gens sont fous au pire ou faux au mieux. Ne savent-ils pas pourquoi on est là ? Ne savent-ils pas pourquoi j’ai payé mon billet ? C’est pour les handicapés. C’est pour la vie dure qu’ils mènent. Pas pour écouter des discours débiles qui auraient tous eu un « zéro-hors sujet » dans la moindre composition écrite du secondaire trois. Je vais pisser en pensant que ce monde m’étonnera toujours. Par la connerie de ses protagonistes. Par le manque de jugement de ses acteurs.

Quand je me rassois, l’illusion est partie. Je suis déjà redevenu cynique. J’ai déjà perdu l’innocence avec laquelle je suis entré dans ce resto, comme si je rentrais dans un temple, lavé de tous mes pêchés et que je venais rencontrer le bon Dieu. C’est comme ça que je suis rentré ici. C’est comme ça que j’ai serré les mains. C’est dans cet esprit que j’ai avalé mon foutu café. Le temps de quelques discours. Le temps de quelques gaucheries. Et me voilà redescendu sur terre. Et me voilà revenu vers ce monde con, con, con. Et me voilà parmi mes semblables à manger piteusement un souper et à exprimer ma grande déception.

Reviendrai-je l’année prochaine ? Oui. Pour les handicapés. Les handicapés du corps. Parce que ceux de l’esprit sont pléthore. Et je n'ai pas de temps pour tout le monde. Je me spécialise, voyez-vous ?


pissou * : Jadis, quand les francophones du Québec étaient encore "maltraités" par les anglophones (certains me diront qu'ils le sont encore, mais ça c'est une autre histoire), ceux-ci leur criaient : Pea soup, pea soup ! Parce qu'ils étaient pauvres et mangeaient beaucoup la soupe aux pois. C'était devenu une insulte. Voilà que les francophones eux-mêmes l'ont intégré à leur langage. Dans leur bouche, ça veut plutôt dire, quelque chose comme 'lâche', 'trouillard'...


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Prévisible, vous avez dit prévisible ?


Je ne me présenterai pas aux prochaines présidentielles.


J’appuie Sarko.


Je suis tellement surpris.

Tu me prends au dépourvu, Jacques.

Je ne m’y attendais pas du tout.

Ah, que la politique me donne la nausée parfois !!

Pas Sarko, please !!


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Wednesday, March 14, 2007

Le combat des coqs

Enfin...Le débat des chefs. Je ne peux pas m'empêcher d'en parler. Voici, brièvement, ce que j'en retiens :

- Dumont parle dans l'air. Aucun chiffre. Aucune crédibilité. Mais il vulgarise. Mais il parle beaucoup des régions. Mais les régions l'adorent. Et son autonomie à deux pièces, on n'y croit pas deux secondes. C'est une bouffonnerie. Une entourloupette. Du n'importe quoi. Et puis, il a sorti sa bombe concernant l'effondrement du pont de la Concorde. Et Charest de sortir de ses gonds et de l'accuser d'irresponsable.

En gros Dumont n'a pas été bon à mon avis et a manqué de crédibilité. Mais je suis un Montréalais. Je ne suis pas la clientèle cible de Super Mario.

- Boisclair s'est globalement bien défendu. Sauf que sa manière de répéter la même question est un peu "gamine". Ça fait débat-101. Ça fait mes amis et moi qui débattons un samedi soir sur le meilleur joueur de l'histoire du cricket. Ça ne fait pas sérieux. Il a quand même embarassé et Charest et Dumont plusieurs fois.

En gros, il s'en est bien sorti. Mieux que les deux autres à mon avis. Surtout que les attentes étaient basses de la part de ses partisans.

- Charest a été terne. Enfin, normal. Sans éclat. Sans véritable fougue. Un politicien blasé qui se base sur les statistiques et qui se dit que les Québécois réélisent toujours leur gouvernement une deuxième fois. Il s'est énervé à la vue du document-surprise de Dumont. Et c'est normal. Car il ne s'y attendait pas. Et des surprises, ça fait mal pour un premier ministre sortant, car ça le déstabilise. Et déstabilisé, il ne devrait pas être. C'est son éminence le premier ministre quand même.

Charest ne mérite pas un deuxième mandat. Il a tapé fort sur les étudiants, entre autres, dès le début de son mandat. Jamais, je n'ai vu autant de grèves, de manifestations au Québec que depuis que John est au pouvoir. L'élire de nouveau, pour moi, serait une catastrophe, un manque de jugement, une paralysie de la mémoire.

- Personne, comme l'a indiqué Petrowski dans La Presse ce matin, n'a parlé de culture. La culture on s'en fout. Dans une province de 7 millions d'habitants insécures sur les sujets de la langue et de l'identité, la culture passe en dernier. Enfin, la culture ne passe pas. On n'en parle pas. Ça n'existe pas. Qu'en pensez-vous ?

- Personne - ou alors ça m'a échappé car je suis arrivé un peu après le début du débat - n'a parlé de la classe pauvre. Je ne parle pas des mères mono-parentales. Je ne parle pas des jeunes parents qui triment. Je ne parle même pas des étudiants. Je parle des Pauvres. Ceux qui traînent dans les rues. Ceux qui ne s'en tirent pas dans la vie. Ceux qui sont dans la marge de la société. Ah Françoise, si tu avais été là ! Ah Amir, si tu avais été là !

- C'est une barbarité (un hispanisme qui me plaît - una barbaridad - et que je n'ai pas besoin d'expliquer) que de voir les deux chefs des deux autres partis (les verts et le Québec Solidaire) écartés du débat. On parle ici de 15% des intentions de vote. On parle de 15% de la population qui aurait voulu voir ses idées, ses idéologies même, présentées au grand public. Déjà que ce ne sont pas les partis les plus riches du Québec. Déjà qu'ils manquent pas mal de visibilité. Il fallait en plus qu'on étouffe leurs voix et qu'on donne la chance SEULEMENT aux trois potentiels gagnants. Moi, je veux écouter les perdants aussi. Les pseudo-chefs suffisants, comme dirait mon grand-père Québécois, j'en ai plein le Casque.

- Jeudi soir à 19h sur RDI, il y aura un débat entre les cinq chefs des partis. L'émission s'appelle "Le choc des promesses". Si vous êtes déçus, et c'est un euphémisme dans mon cas, de l'absence des deux autres chefs, ne ratez pas cette émission.

- Je n'aime pas Charest. C'est-tu assez clair ? !!


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La chanson de la semaine

Je ne sais comment partager avec vous une chanson sur blogspot. Je vous mets les paroles. Et je vous dis que je l'écoute en boucle depuis quelques semaines. Et je dis merci à la personne qui me l'a filée.

aunque sientas dolor
sigues continuando, subiendo, continuando
aunque tengas temor
sigues continuando, cruzando, continuando

pues la vida siempre te dara,
un camino, unico a ti
con tiempo veras
con tiempo veras

aunque tengas preguntas
sigues continuando, buscando, continuando
aunque baje la sombra
sigues continuando, navegando, continuando

algunas veces, tal un capitan
naveguaras en tu soledad
hacia tu tierra

aunque dañan tus sueños
sigues continuando, sembrando, continuando,
hasta los dias tranquilos
sigues continuando, explorando tus deseos

la vida es un mar tan bravo
abraza los momentos lindos

la suerte es caprichosa
quieta y digna, atraviesa
la fortuna y la miser


de Jehro.

Pour les hispanophones, vous reconnaîtrez que les paroles sont certes légères, mais pas "vides de sens". J'aime la légèreté. J'aime le sens. J'aime les sens.

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Tuesday, March 13, 2007

Heureusement que ce ne sont pas des lumières

C'est une histoire drôle.

Deux kamikazes rentrent dans un cybercafé à Casablanca, le dimanche 12 Mars vers 22h00 heure locale. Ils sont agités. Ils veulent consulter un site djihadistes. Le fils du propriétaire de l'établissement s'y oppose. Ils se disputent. "L'un des deux individus a été emporté par une charge explosive dissimulée sous ses vêtements et est décédé sur-le-champ", (Le Monde). L'autre, blessé, essaie de s'enfuir. La police l'arrête. Le fils du propriétaire et deux autres personnes sont blessés.

C'est une histoire très drôle.

Ou comment les terroristes jouent à Gaston Lagaffe. Parfois.

C'est une histoire hyper drôle.

Ou comment le courage d'un jeune citoyen Marocain a, probablement, sauvé plusieurs vies.

C'est une histoire tellement drôle.

J'en ris tellement.

J'en ai les larmes aux yeux.

J'en ai les larmes aux yeux.


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Frais scolaires

Je vais peut-être en choquer plus d'un. Car, je vais voter Québec Solidaire. Car, je suis un étudiant. Car je me prétends de gauche. Mais des fois...

Je ne suis pas pour une "hausse des frais de scolarité" tout court. Je suis pour l'indexation de ces frais. Je m'explique : si je vis avec mes parents, l'un avocat et l'autre haut cadre dans une compagnie pétrolière, je devrais payer un prix X, plus élevé que le prix Y que payerait un étudiant vivant en appartement, travaillant la fin de semaine et vivant essentiellement des prêts (car les bourses, depuis que John Charette est là, ce n'est qu'un mythe). Ça me paraît logique et normal. Il n'y a rien de choquant là-dedans. Je ne distingue pas la "droiture" de cette idée. N'est-ce pas comme ça que la société Québécoise fonctionne de toutes les manières ? Les plus riches payent plus d'impôts que les pauvres (sauf ceux qui s'enfuient vers des paradis fiscaux, mais ça c'est une autre histoire...). Alors, pourquoi les étudiants montent-ils sur leurs grands chevaux quand on leur parle de hausses de frais de scolarité ? Peut-être, justement, parce qu'on utilise le mot "hausse". C'est d'indexation qu'on devrait parler. Moins tu as de problèmes financiers, plus tu devrais payer. Plus tu es pauvre, moins tu devrais payer. Gratuité des frais de scolarité ? C'est utopique. En Amérique du Nord, c'est très utopique. Il faut payer quand on a les moyens. Que ceux qui triment, ne payent pas du tout. Pas de problèmes. Que ceux qui ont de l'argent payent pour les autres. Ainsi, il y aurait un équilibre. Ainsi, nous irions vers une scolarité universelle, à la portée de tout le monde. Car les parents riches sont souvent scolarisés. Et comme ils le sont (riches et scolarisés), ils veulent que leurs enfants le soient aussi (riches et scolarisés). Alors, ils payeront. Le contraire est parfois vrai aussi. Alors, que les enfants de familles pauvres aient le droit d'étudier gratuitement !

Ce que je dis est peut-être difficile à réaliser. Mais pas impossible. Nos politiciens peuvent certainement construire un pareil système. En ont-ils la volonté ? Le courage ? Sommes-nous capables de percevoir le bienfait d'un tel régime ?
Ou suis-je aveugle et je n'en vois pas les grosses failles, le danger (À part sa mauvaise gestion...) ?

Qu'en pensez-vous ?


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Sunday, March 11, 2007

Quand je suis de mauvaise foi

On regardait la télé. Quatre amis qui se préparaient à jouer aux cartes. Vendredi soir. On zappait. Le temps de prendre un thé, une bière, de discuter. Avant d'entamer un marathon de parties de cartes (qui n'eut pas lieu, mais ça, c'est une autre histoire...). Télé-Québec. Belle et Bum. Lynda Thalie. J'ai l'impression qu'elle est tout le temps à Belle et Bum. J'ai l'impression qu'elle chante tout le temps ce remake qui rendit Rachid Taha populaire 'Ya Rayh'. (Elle n'a que ça à faire ou quoi ?) Elle ne chante pas toute seule. Y'a Luck Mervil qui se déhanche à côté d'elle. Je lâche tout bêtement :

- Je n'aime pas ce type.

- Pourquoi ?

- Il est pour toutes les causes. La souveraineté. L'environnement. Les femmes. Haïti. Rwanda. Il est partout. Ça m'énerve.

- Au moins, il est pour les bonnes causes.

- Oui, mais, à un moment donné, il faut prendre un break, t'sais..

Je n'ai pas argumenté longtemps. De toutes les manières, je ne les ai pas, les foutus arguments. Je ne les ai pas. Luck Mervil fait son devoir de citoyen. Il se bat pour des causes auxquelles il croit. Mais comprenez-moi, je le vois partout. Débat sur les accomodements raisonnables ? Il est là. Belle et Bum ? Il est là. Il va y avoir du sport ? Il est là. L'autre fois, j'ai loué 'Un Dimanche à Kigali'. Devinez quoi ? Il était là. Encore. Toujours. Quand il passe à la télé, il fait dans la démagogie. Bein, moi, j'vais vous l'dire : les donneurs de leçons me donnent la nausée. Même si leurs leçons sont bonnes. Même s'ils ont raison. Ça ne me prend pas plus que cinq minutes pour être de l'autre côté. Du côté des autres. De ceux qui disent peut-être des conneries, mais qui n'essaient pas de prêcher la bonne parole. Et je le sais. Je le sais d'emblée. Luck Mervil doit être un chic type. Avec des convictions, des trippes et tout le tralala. Mais je ne suis pas capable. Pas capable...

Coudon', serais-tu jaloux ?

Jaloux de quoi ? D'être de toutes les causes, de toutes les tribunes ? Non merci.


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Friday, March 09, 2007

La campagne éléctorale est à côté de chez vous

Ce matin. -20. Unplugged de Rage Against The Machine dans ma tête. Soif. Soif. Soif. Corps complètement déshydraté (Devinez pourquoi:)). Métro. Et surprise...Une dame couverte de la tête au pied avec un manteau marron me sourit et me tend une carte...

Elle : Bonjour.

Moi : Louise Harel* (remarquez que je ne suis pas très poli à 7h 45 du matin !)

Elle : Oh, ça me fait plaisir, vous me reconnaissez.

Moi : Bien sûr.

Elle : Donc vous suivez la politique.

Moi : (envie de lui faire une de ces phrases toutes faites à la 'La politique, si vous la suivez pas, c'est elle qui vous suit', mais...Soif. Soif. Soif.Mal de tête. Mal de tête. Mal de tête) Bien sûr. Bien sûr.

Je lui souris. Et je m'en vais.

Je ne voterai pas pour elle. Malgré son beau sourire. Malgré son courage de braver le froid pour accueillir des gens dans le métro, qui ne la reconnaîtront même pas. Malgré une multitude d'autres choses.

Je ne voterai pas pour elle.

Pourquoi ?

Pour moult raisons. Mais surtout parce qu'elle va gagner de toutes les manières. Mon quartier vote massivement PQ. Et je n'aime pas voter pour les gagnants.

Est-ce dire que j'aime les 'loosers' ? Peut-être. C'est surtout que d'autres ont besoin de mon vote. Plus de votes. Plus d'argent. Plus de visibilité. Plus de débats. Et peut-être un demain meilleur. Un demain lointain, certes. Mais un demain quand même.

* : (Pour mes amis d'outre-mer) Louise Harel est la députée actuelle d'Hochelaga-Maisonneuve. Elle est membre du Parti Québécois. Un parti souverainiste qui promet un troisième référendum sur l'indépendance du Québec s'il est élu au pouvoir.


Wednesday, March 07, 2007

Yulblog

Je m'étais promis de ne jamais aller à ce genre de "rassemblement". D'abord, parce que le but de mon blogue n'a jamais été ça. Ensuite, parce que les foules avec un même but, une même vocation, ça fait secte, ça fait religion, ça fait bizarre finalement.

Mais.

Y a que les fous qui changent pas d'avis.

Il y a des blogueurs intéressants. Enfin, d'après ce qu'ils écrivent. Existent-ils vraiment ?

Alors, comme dirait mon grand-père Québécois imaginaire : J'y vas-tu ou j'y vas pas ?

Moi ? Pas moi ?

Vu chez Gen. Je ne suis pas sûr du résultat. Mais c'est drôle. Amusant. Ludique.

Qu'est-ce qu'on ne ferait pas à -30, en pleine rédaction de mémoire !




Monday, March 05, 2007

La marche n'est pas toujours bonne pour la santé



Il neigeait tellement. Je marchais sans but.
Me voit-on quand je marche sous la neige ? Suis-je visible ?

Je marchais.

Je me posais un tas de questions. Et si je tombais dans les pommes ici en pleine neige ? Quinze centimètres. Vingt centimètres. Me trouverait-on ? Si oui, ce serait quand ? Dans deux heures ? Dans deux jours ? Qui se rappellera de mon existence ? Qui remarquera mon absence ?

Je marchais.

Il ventait fort.

Pourquoi congèle-t-on les morts dans les morgues ? Pour les garder en état. Alors, si je marche souvent dans le froid, mon visage ne vieillira pas. Parfait. Je marcherai tous les jours qu’il fera froid. Et les autres jours, je mettrai ma tête dans le congélateur pendant quelques minutes. Ça éloignera les rides. Je serai éternellement jeune. À moi la jeunesse éternelle.

Je marchais.

Les voitures passaient, poussant la neige de leurs pneus usés. La neige encourage l’anonymat. On ne reconnaît personne. On est tous ensevelis sous des vêtements, des bonnets, des gants, des foulards. Qui est mon voisin ? Qui est la conductrice ? Qui es-tu ? Qui suis-je ?

Je marchais.

La vie est étrange. Beaucoup de questions. Peu de réponses. Réponses erronées. Réponses évasives. Réponses trop courtes. Réponses trop explicatives. La vie est étrange. La découverte hebdomadaire de ma propre incapacité à la vivre me pousse à vouloir la vivre plus fort. Je m’accroche à l’impossible. Je m’accroche à l’inexplicable. Je m’accroche. Parce que je ne sais pas. Pas. Pas. Pas

Je marchais.

La neige dansait dans le ciel. Elle faisait des pirouettes. Et la lumière du lampadaire filmait ses mouvements. La neige est reine dans le ciel. Puis elle tombe. Et c’est fini. C’est comme moi. Je marche. Un jour, je tomberai et ce sera fini. C’est comme la feuille de l’arbre. Elle fleurit. Elle verdit. Elle jaunit. Elle tombe. Et c’est fini. Mais il y aura d’autres feuilles, d’autres arbres, d’autres flocons de neige, d’autres moi, d’autres moi. Et peut-être que ça ne finira jamais.

Je marchais.

Je pensais.

Machin-chouette. Couki-coukou. La girouette du diable. Les fleurs du makassouka. La pyramide du fricoti. Le dessin de Gombixti. Les poèmes sarpissiens. La mer du paradis. Le soleil des uns est le soleil des autres. Le soleil des uns est le cauchemar des autres. Les uns sont les autres. Les autres sont les uns.

De la fumée par les oreilles.

Deux aspirines.

L’hôpital.

On va t’interner.

Un jour.

Marche. Marche. Marche.

Tu ne te sauveras point.

Je marchais.

Et la neige dessinait des poèmes dans le ciel furieusement noir d’une soirée d’hiver.
Et la blancheur de la neige contrastait avec la mélancolie du paysage.
Et la solitude du protagoniste remplissait le vide apparent du décor.
Et l’absence de bruit lui faisait croire qu’il était ailleurs.
Et l’odeur du froid remplissait ses narines.
Et son cerveau travaillait.
Et son cerveau travaillait.

Une barque. Une mer douce et paisible. Un chapeau. Des rides. Un ventre. Des bières. La solitude. Le rayon de soleil. Une canne à pêche. Et le silence. Quelques oiseaux qui couinent de temps en temps. Et le temps qui prend son temps. Et le calme qui est roi.

Je ne marchais plus.

Je flottais.

Je flotte.