Monday, March 07, 2011

Le bout du tunnel

Je ne la connaissais pas. Je ne la connaissais point. Et la nouvelle est tombée. Comme un amat de rochers qui tombe dans une minuscule piscine. La terre a tremblé. La piscine ne pouvant tout prendre, l'eau a débordé. Les larmes ont débordé. De partout. De partout.

Elle est mourante. Cancer. Cancer du coeur. Il y en a cinq dans le monde entier.

Il faut aller la voir. Là-bas. À Laval. Les soins palliatifs. J'ai eu mal au coeur. Et ce n'était pas de circonstance. Il aurait fallu avoir mal au foie, aux poumons, aux ganglions, à la cheville droite. N'importe quoi. N'importe où. Mais pas le coeur. Je n'avais pas le droit.

Une longue route. Un silence pire que le pire des vacarmes. Le noir. Car il fait nuit. Dehors et dans nos coeurs. Je n'ai pas envie d'y aller. Elle est mourante. Je sais que ça va me marquer. Je le sais.

Une longue route. Et au bout, la clinique. C'est propre. Tout le monde sourit. Les bénévoles sourient toujours. Comme pour dire que oui, ils sont fiers de ce qu'ils font. Que c'est vrai. Que ça vient du coeur.
Encore le coeur ! Je n'ai pas le droit.

La chambre. Le lit. Vide. Où est-elle ? Partie fumer.

Pas le temps pour la morale à deux sous. Elle fume. Elle va mourir. Elle peut bien fumer, non ?

Je prends un siège. Je fais le con. Un peu plus et je ferai des pirouettes. Pour adoucir l'atmosphère. Mais elle ne s'adoucit pas. Il n'y a rien à faire.

La fille et le conjoint ont faim. Ils commandent quelque chose.

Elle entre. La peau blanche. Très blanche. Mais le sourire. Elle est vivante. Plus vivante qu'un million de cons de ce monde. Brel surgit : "Je te dis mort aux cons - Bien plus cons que toi - Mais qui sont mieux portants." Je la serre légèrement. Non. Pas la compassion. J'ai pas le droit. Non. Pas la pitié. J'ai pas le droit. Pas le droit. Pas le droit. Reste vrai.

Je reprends mon siège. Je l'écoute parler. Les assurances. La notaire. La mort. La mort. La mort.
J'ai mal au coeur.
Pas de commentaires.

La commande arrive. Ils se sont trompés. La fille les appelle. Elle se fâche. Elle annule. Ils vont se déplacer. C'est bien. La futilité de la vie qui continue. C'est ça qu'il faut. Sinon, ce serait la tragédie chaque jour. C'est lourd à porter, la tragédie chaque jour. C'est bien. Allez manger !

En arrière d'elle, une guitare. Je me demande qui en joue. Je le demande discrètement. On me répond : les madelinois. Tous les madelinois chantent. Tous les madelinois jouent de la guitare.

Ah bon !

J'aime.

Je reste tranquille. Ma tête arrête de fonctionner. Je suis amorphe. Fini. Une larve. Je n'en peux plus. Que quelqu'un prenne cette guitare et qu'il me chante quelque chose. Du genre "life is life, nana na na na".
Oui, je sais. Je n'ai pas le droit.

On s'en va. Je la serre de nouveau. Légèrement. Sans exagération.

Même route. Même silence. Même nuit. Mêmes démons. La route est longue.

Deux semaines plus tard (ou moins ??), elle n'est plus.
On l'expose.
Malgré une moitié de vie en occident, je n'arrive pas à m'habituer à cette tradition. On m'appelle pour lire un (beau) texte, dédié à elle. C'est à côté du corps. Mes jambes manquent de me lâcher. Je lis rapidement et galope vers la sortie.

Une discussion avec le frère. Un homme simple. Avec un bel accent. C'est là que la vie devrait être comme facebook. J'aurais cliqué "J'aime". Mais non. Ce n'est pas comme ça, la vie. Je l'écoute. Et ses histoires me bercent. Il me parle des îles. Et j'ai envie d'y aller. Quelque chose dans ses histoires me fait penser au Maroc. Est-ce la mer ? La simplicité des gens ? Plus il parle, plus je pense au Maroc.

Un chameau aux Îles de la Madeleine, ça survivrait ? Un essai s'impose.

On s'en va.

Elle est partie. Derrière elle, des enfants heureux, des frères et soeurs amoureux de la vie. Une soeur pleurante. Une mère sanglotante. Des amis aux coeurs brisés. Un amoureux aux cernes grandes comme un océan, noires comme la nuit, creusées comme une tombe.

Cette tombe qui nous attend tous.

Si je meurs aimé comme elle, je mourrais satisfait. Ce sont mes dernières pensées. Alors que je m'éloigne. Alors que dans mes oreilles bourdonnent encore les sanglots de la soeur et le cri étouffé de la mère; et que dans ma tête tourmentée se répète la même maudite question sans réponse : pourquoi ?

Bon voyage !


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Saturday, January 15, 2011

Tunisie

Adieu Zinochet !

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Wednesday, September 29, 2010

Trois jour au Maroc

Pise-Marrakech. Beaucoup de marocains vivant en Italie. Des familles toutes entières avec des bagages pour vivre un demi-siècle. Des enfants, des jeunes, des adultes, quelques vieux. Un peu plus que deux heures de vol. La pagaille. On dirait la SNCF en avion. Je m'endors souvent en avion. Pas cette fois. C'était bizarre. Jamais je n'étais venu au Maroc pour 3 jours.

À l'arrivée, nous cherchons un taxi. Le prochain train pour Rabat est dans une heure. Les chauffeurs veulent charger 100 DHRS. Je proteste énergiquement. Le "chef" me demande de patienter, il va appeler un "ami". Ce sera 80 DRHS. J'accepte.

Le train. Quelques jeunes marocains dans notre compartiment. Ils se plaignent. Le Maroc ci, le Maroc ça. Je leur dis que c'est partout pareil (ou presque) et que le Maroc a quand même ses "atouts". Je me rends rapidement compte que je prends la "chose" avec une approche occidentale : positivisme, encouragement, etc. Je me tais. J'ai presque honte. Pourquoi parler à mes frères en occidental. Ça n'a l'air de rien, mais ça pourrait faire l'objet d'un doctorat. Où est l'oriental en moi ?

Je leur souhaite bonne chance. Vraiment de bons types.

Rabat-ville. Un autre taxi. On arrive chez mes parents. Ils sont réveillés. Il est presque minuit. Je suis content. Mais aussi triste : je pars dans 3 jours.

Le lendemain matin. Direction le cimetière. Je ne peux déroger à la règle. Chaque année, visite de la tombe des défunts grands-parents et de leur fils, mon oncle. Et c'est les larmes et l'émotion. Et c'est le coran qui te rentre par le nez, la bouche et les oreilles. Et c'est ton âme qui vibre. Et tu ne sais plus si tu pleures leur mort ou la tienne dans l'avenir. Et je suis soulagé. Oui, soulagé. Parce que l'oriental en moi est toujours là bien vivant.

La médina. Les babouches. Les bijoux. Ma soeur me reproche tout de suite ma latitude envers les marchands : je ne négocie presque pas. Mais que lui dire ? 3 jours au Maroc, ma soeur. 3 jours au Maroc. J'ai presque honte. Ils n'ont rien. Ils n'ont que moi et tous les autres qui viennent en été. Laisse-les vivre. Et voilà. Chassez l'occidental, il revient au galop. Je me tais encore une fois. Et j'achète. Souvent ce dont j'ai besoin. Des fois, ce dont je n'ai pas besoin. Rien n'a changé. Mêmes visages. Mêmes mendiants. Même médina. Le jour qu'elle ne sera plus pareille. Je ne reviendrai plus. Je saurai que c'est fini. À jamais. Mon enfance. Dans la poubelle. Dans la mer houleuse. Dans les nuages. Quelque part d'autre qu'ici, dans mon Rabat natal. Qui n'existe certainement plus. Que dans mes rêves. Que dans ma nostalgie. Que dans mon idéal. Que dans mon pauvre cerveau.

La famille. Je les aime. Enfin, j'en aime quelques un(e)s vraiment. Les autres, je les aime aussi. De tout mon coeur. Dans leurs yeux, je me revois à 10 ans, à 15 ans. Je me vois jeune et hésitant. Porteur de grands espoirs et (déjà) de grandes déceptions. Je les sais qui se disent : il a changé. Il parle. Avant, il était timide et maladroit. Maintenant, il nous "explique". Pour qui se prend-il ? Je me tais. 3 jours au Maroc, ce n'est guère facile. Alors, je n'explique rien. Je regarde autour de moi. Des cousins beaucoup plus jeunes que moi, passent et repassent. La nouvelle génération. L'avenir de la famille. Je suis la branche du grand arbre qui a pris racine ailleurs. L'arbre est dans la forêt. La forêt pousse, grandit, brûle des fois. Et la vie continue.

La plage. Il ne fait pas beau. Gris. Nuageux. Rien n'est comme avant. Même le soleil a déserté. Deux jeunes se disputent. Le plus fort gifle le plus frêle. J'essaie de les séparer, de les raisonner. Le frêle pleure. Le fort bombe le torse et parle de son passé de prisonnier. J'ai envie de leur dire que tout ça, c'est de la pisse de chat. Que ça ne vaut pas la peine. Que c'est vil. Mais qui suis-je ? Je me tais. Plus tard, un flic arrive et embarque le "fort". Un semblant de justice. Enfin...

Ma cousine et moi avons amené un cousin avec nous. Il ne parle que rarement. Tu veux manger ? Non. Tu veux boire ? Non.

On ne reste pas longtemps. Il fait trop gris.

Ma cousine s'en va à Marrakech le lendemain. Ma soeur part avec elle. Je reste avec ma mère et mon père. Je sors voir des matchs de foot (coupe du monde) avec des amis. Je ne vois chacun qu'une fois. Des fois, je fais une mi-temps ici, l'autre mi-temps là-bas. Le temps passe vite. Très vite.

Heure de départ. Ma mère me dit les larmes aux yeux que, peu importe 3, 2 ou même un jour, il faut que je vienne. Je hoche la tête en guise de oui. C'est la station de train. Les gens courent à droite et à gauche sans savoir la tragédie gréco-marocaine qui leur passe sous le nez. Un fils. Une mère. Des kilomètres. Des larmes. Le déchirement. Ils courent, mais entre moi et ma mère le temps s'est figé. Ses yeux. Ses yeux. Je ne les oublierai jamais. Jamais.

Je tourne la tête et part. Je ne me retourne pas. Je la sais qui respire difficilement. Je la sens. Je sens son coeur battre. Maudite soit la vie !

Le train. Je mets mes écouteurs sur les oreilles et je ferme les yeux.

Insociable.

J'assume.

L'avion. Marrakech-Pise. Je ne sais pas comment décrire ce sentiment. Cette joie de les voir, cette tristesse de partir, tout en trois jours. Tout en 72 heures. C'est les montagnes russes. C'est l'hiver montréalais et l'été Marrakchi.

Et cette phrase d'un ami.

Ne nous refais plus jamais ça. Je ne sais même plus si tu es vraiment venu.

Moi, non plus, je ne le sais plus.

Moi non plus !

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Wednesday, July 14, 2010

Goodbye Roma

J'ai quitté la chambre vers 7h du matin. Les rues étaient fraîches. Mes joues étaient fraîches. Mes yeux étaient frais. Et ma gorge serrée. En arrière, j'ai laissé 17 merveilleux jours de vacances et, surtout, ma cousine. Ma soeur. Mon âme soeur. C'était fini. Mon avion partait à 9h 55 d'un aéroport. Le sien partait à midi d'un autre aéroport. C'était fini. J'ai pris ma douche, rangé mes affaires et l'ai prise dans mes bras. L'émotion était là, partout, dans l'air, dans son visage et dans le mien, dans nos yeux d'enfants qui refusent de grandir. "Nous devrions faire ça chaque année. Voyager." "Oui". Je l'ai prise dans mes bras et je suis parti par la petite porte de l'hôtel. Les fins sont toujours douloureuses. Les fins sont toujours par la petite porte. Deux semaines à prendre des avions, des bus, des petits-déjeuners pas si petits que ça, à marcher, marcher, marcher. Deux semaines à discuter de choses graves ou futiles. Deux semaines à voir des matchs de foot dans des bars aléatoirement choisis, en italien, avec deux ou trois cafés "macchiato latté" et quelques sandwiches choisis et mangés à la sauvette. Deux semaines à découvrir, à visiter, à se photographier mille fois et dormir quelques heures. Avant le prochain voyage. Avant la prochaine chambre d'hôtel. Avant la prochaine pizza végétarienne. Avant la prochaine plage.

Dans la rue, un homme qui essayait de monter une grosse armoire dans sa non-moins-grosse voiture, me parla en italien. Il semblait me demander de l'aide. J'avais deux valises et un sac dans la main et je courais vers le bus qui m'amènerait vers l'aéroport. Il me restait dix minutes et un bon petit trot à faire encore. Mais je ne pus lui refuser mon aide. Non pas que je sois foncièrement gentil. Mais le départ, les émotions, les vacances finies. J'en avais marre de tout. Je l'ai donc aidé. Pour ne pas parler. Car parler aurait signifié pleurer. Et je ne voulais pas pleurer là, devant un italien que je ne connais ni d'Ève ni d'Adam, qui en plus essayait de monter une grosse armoire dans une voiture, si tôt le matin. Je l'aidai. Rapidement. Sans parler. Et je suis parti. Fuck la politesse et les formules de civilité.

Un asiatique petit comme trois pommes me vendit mon billet d'autobus. Ensuite, il me demanda l'heure de départ de mon avion. 9h 55, lui lançai-je. Rends-moi mon billet tout de suite, me répondit-il. Pourquoi ? On n'arrivera jamais à temps. Je lui rendis le billet, il me rendit mon argent. Je fais comment alors ? Prends le train. Il part quand ? Dans cinq minutes. Rangée 21. Et merde ! Faut encore que je coure.

J'ai couru. Et c'est drôlement difficile de courir avec deux valises et un sac. J'arrivai en sueur au train. Fiou. Je sortis mon petit croissant au chocolat de mon sac et le mangeai hâtivement. Émotion ou pas, j'avais faim.

Le train démarra. J'imaginai ma cousine seule dans la chambre. Elle devait être sur le balcon en train d'admirer Rome dans sa robe matinale.

Il faut être fort et ne pas pleurer.

C'est ce qu'on nous a toujours enseigné.

J'ai pleuré dans mon train. Seul. Avec un croissant dans la bouche. Et mille images inoubliables dans la tête.

Hasta pronto Italia !

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Thursday, June 03, 2010

Chronique d'un départ annoncé



Quand j'arrive, ça sent différent. Moult personnes s'activent dans tous les sens. Ils sont bruns ou blonds, grands ou petits. Elles sont belles ou moches, arrogantes ou effacées. Je m'en fous. Je respire l'air : ça sent la liberté. Je n'ai plus faim. Je n'ai plus soif. Je n'ai plus rien. Je plane. Un sentiment d'apesanteur m'envahit. Je vais directement au kiosque. Le Monde Diplomatique. Jeune Afrique. Première (en français). Hop, dans le sac. J'ai déjà hâte de vous lire entre deux pauses-roman. J'ai des frissons. J'ai tellement de frissons que j'en ai finalement faim. Je ne mange presque jamais de junk-food. Mais ici, c'est le no-rule-land. Je mange tout. Je mange n'importe quoi. Tout est permis. Un double whopper, un grand litre de coke, des frites, de la mayonnaise, du ketchup. Je suis prêt. Je n'ai aucune peur de l'adversaire. Je plonge.

C'est la première guerre mondiale dans mon ventre. Il y a des fusées, des charts d'assaut, des tanks, ça mitraille de partout. Je reste assis. Le calme fera peut-être passer la tempête. Je regarde autour de moi. Les gens sont plus beaux que "de l'autre côté". Plus attentionnés aussi. Monsieur va chercher ceci pour sa femme. Il prend son sac, sa valise, son plateau. Elle finit de manger. Il débarasse pour elle. Est-il aussi galant dans la vie de tous les jours ? J'en doute. J'en doute fort. Ici, c'est un autre monde. Le monde des gentils.

Je me lève, histoire de me dégourdir les jambes (et le ventre). Je finis par atterrir au même kiosque. Je regarde les livres. Des "best-sellers". Leurs jaquettes me dégoûtent. Il y a du vert, du jaune, des couleurs fluorescentes. On dirait E.T en livre. J'ai des à priori. C'est comme ça. Une jaquette sobre avec (seulement) le titre dessus, ça ne leur disait pas ? Mon ventre me fait mal. Deuxième guerre mondiale. Je sors du magasin en vitesse, avant qu'une attaque d'angoisse ne vienne gâcher mon plaisir.

Le plaisir de partir. Le plaisir de voyager. Le plaisir de voler, plus haut, plus loin, vers d'autres cieux !


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Thursday, May 20, 2010

In three weeks




Amalfi coast.

Can't wait !

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Friday, May 07, 2010

Still here



Facebook. Twitter. Nba finals. F.C Barcelone. Les cerfs-volants de Kaboul. Trop d'anniversaires à fêter. Mon prochain voyage. Et tout le reste.

Je ne suis pas loin. De retour bientôt !

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