Tuesday, September 30, 2008

Les citronniers



Salma, une veuve palestinienne, possède un petit terrain de citronniers. Israel, le nouveau ministre israélien de la défense, déménage en face de chez elle. Bientôt, Salma reçoit un avis de la cour israélienne : par mesure de sécurité, on doit couper tous ses citronniers. Salma engage un avocat palestinien et, du coup, une bataille juridique qu'elle se promet de ne point perdre.

- C'est triste. Parce que le sujet, parce que, surtout, les yeux tristement tristes de Hiam Abbass.

- C'est touchant. Pour les mêmes raisons.

- C'est intelligent. Parce que la douce critique du machisme palestinien (arabe, en général). Parce que la femme du premier ministre. Parce qu'Eran Riklis, réalisateur, aussi, du beau "la fiancée Syrienne", nous montre petit à petit, gentiment, l'absurdité de la "chose".

- C'est féministe. Parce que c'est aussi l'histoire d'une femme qui se bat contre vents et marées, pour ses droits bafoués sans vraie(s) raison(s).

- C'est prévisible. Parce qu'on connaît tous la fin, avant même de voir le film.

- Ce n'est pas si prévisible que ça. Parce que ce n'est pas exactement la fin à laquelle on s'attendait.

- C'est courageux. Parce qu'un israélien qui fait un film pareil, ça demande du courage, beaucoup de courage.

- C'est (presque) une bonne nouvelle. Parce que ça prouve, comme le répètent souvent certains, qu'Israël est, bel et bien, une démocratie. Mais à quoi ça sert d'être démocratique avec ses citoyens (et encore, pas tous...) et sanguinaire envers les "autres" ?....

- C'est beau. Parce que c'est, tout simplement, un beau film !

Labels: ,

Monday, September 29, 2008

SeulS



Je m'attendais à beaucoup. Parce que j'avais vu "Incendies" et que c'était très bon. J'aurais mis ma main au feu que ce serait un chef-d'oeuvre. Et ça l'était. Presque. 1h 30 de magie, d'intelligence, de belle mise en scène. 1h 30 où je n'ai point senti le temps passer, captivé par le jeu, par le sujet, par la musique qui m'a fait vibrer (imaginez Fairouz et Abdoul Wahab chantant ces chansons mélancoliques, que tout arabe qui se respecte a imprimées dans un coin précieux de sa mémoire. Des frissons. Moult frissons !). Puis, vint la dernière demi-heure. Et ce fut long, très long. Une longue folie, une longue descente aux enfers et plus ça allait, plus je glissais dans l'ennui, dans l'impatience, presque au bord de l'exaspération. Je te le demande Wajdi, je te le demande sincèrement : avions-nous réellement besoin de tout ça pour comprendre ? J'en doute fort. Très fort. Car on avait compris. On avait compris où en était ton personnage. On avait compris. Les étoiles. La peinture. L'hommage à Robert Lepage. Rembrandt. SeulS. On avait tout compris. Dix minutes de ça, auraient suffi. M'enfin, tu me diras, on en n'est pas à 20 minutes près...

Les critiques sont, apparemment, unanimes. Dans la salle, les spectateurs se sont mis debout, applaudissant, criant au chef-d'oeuvre. Quant à moi, je reconnais le génie, l'effort, la beauté du tout. Quant à moi, j'avoue les frissons, j'avoue l'émotion et je salue le sujet qui m'a touché. Tes sujets me touchent toujours Wajdi. Car on est dans le même sac. Car on se pose les mêmes questions. Car l'exil et l'identité seront toujours là, profondément ancrés au fin fond de nous-mêmes telle une épave désolée au fond de l'océan.

Mais je reste sur ma soif.

Ou ai-je trop bu ?

À la prochaine !


Labels: ,

Monday, September 22, 2008

Las mariposas

C’est ainsi que tout avait commencé. Elle l’avait embrassé par une chaude soirée d’été, sur la bouche, entre les dents, sur les lèvres, nez dans le nez, visage dans le visage et ça avait changé sa vie. Pour la première fois, il avait eu des papillons. Partout. Sur sa bouche, entre ses dents, sur ses lèvres, sur son nez, sur son visage. Partout, partout. Et c’est alors qu’il avait pris sa décision : il aimait les papillons. Il aimerait les papillons. Il serait toujours à la recherche de ces papillons. Toujours. Partout.

Et de papillons en papillons, il rencontra Amélie. Amélie était différente. Amélie avait des cheveux de soie, des yeux de biche, des lèvres couleur de fraises, un sourire radioactif, un regard qui faisait rêver. Amélie lui faisait des papillons. Partout, partout. Mais ses papillons étaient différents. Coquins. Légers. Chauds. Exquis.

Et de papillons coquins en papillons exquis, ils décidèrent de se marier.

Cuba. Île de tous les rêves. Le vent souffle. Il y a tout. Le romantisme, l’amour, les idéaux, le rêve, le rêve, le rêve. Et il était rêveur. Depuis toujours. Depuis son premier souffle. Depuis les premiers papillons. Mais Amélie. Mais le sourire d’Amélie. Rien de plus ne le faisait rêver. Rien. Sauf Cuba. Île de tous les rêves. Il ne pouvait unir sa vie à Amélie qu’à Cuba. C’était clair comme l’eau de roche. Les rêves sont faits pour s’unir. Créer un même univers. Un même pays. Une même utopie.

Cuba. 21 Juillet. Jeudi. Il se marie demain. Il a hâte. Amélie. Ah, Amélie ! Mes yeux de biche. Ce regard qui tue. Il fait chaud. Il a marché, marché, marché. Bu quelques verres de rhum. Parlé, parlé, parlé. Et de verre en verre. Et de parole en parole. Pour la première fois depuis longtemps, il se sentit comme ça. Léger. Frivole. Aérien. Bientôt, il ne pensait plus qu’à ça. Les papillons. D’autres papillons. Toujours des papillons.
Et quand, à minuit moins le quart, Amélie le trouva bouche en bouche, lévres sur lèvres, nez sur nez, avec cette gamine rachitique, cette perche sans formes, cette...fille sans nom et qu’elle se lança sur lui, de tout son corps. Quand après larmes, insultes, coups et griffes, elle lui demanda, boulimiquement hystérique :
- Pourquoi ? Pourquoi ?
Il lui répondit tout bonnement :
- Les papillons. C’est à cause des papillons.

Elle en resta bouche bée. Sans voix.

Depuis elle est allergique aux papillons.

Depuis, il court toujours les rues de Cuba, île de tous les rêves.

Depuis, il collectionne toujours des papillons.


Labels:

Thursday, September 18, 2008

J'ai honte

Je fais le tour des journaux (en ligne) le matin. Comme souvent.

Et je tombe sur ça.

Je suis MILLE FOIS d'accord.

Parfois, j'ai honte !

Harper, avec toi, j'ai SOUVENT honte !


Labels: ,

Tuesday, September 09, 2008

Même pas une gorgée d'eau ?

Ou du chewing-gum ? Ou un petit bout de pain ? Tu es sûr ?

Et pourquoi pas un tajine aux pruneaux pendant qu'on y est ?

C'est comme ça. Le ramadan crée cet "engouement", ce questionnement, cette quête de la vérité, chez l'autre. Pourquoi tu te prives ? C'est quoi le sens de tout ça ?

Je comprends. Parce que, moi aussi, si j'étais né Alexandre Laurier, 25 rue de la Visitation, je n'aurais peut-être pas compris. C'est quoi ce machin-chouette ? C'est quoi cette histoire de ouf (ne pas mélanger avec "une histoire de zoufs") ? Pourquoi se faire mal au point d'en perdre ses couleurs ? C'est n'importe quoi. N'importe quoi.

Je comprends. Parce que, maintenant, y en a qui sont nés Abdullah Bengrga3, et qui te disent tout de go : tu fais encore ça, toi ? Pourtant, tu n'es pas religieux. Pourtant, tu ne pries pas. Tu me déçois. Ça viendra, avec la maturité.

Je comprends. Parce que quand on a grandi avec le frigo plein, l'eau (très) courante, le chauffage à portée de la main, on ne comprend pas ça.

- Mais dis-moi, Jean-Jacques, toi aussi, tu as grandi avec le frigo plein, l'eau...
- Oui, mais justement, ramadan...
- Insinuerais-tu que, si on n'a pas jeûné une fois dans sa vie, on ne peut pas comprendre la misère des autres ?
- Non. Loin de là. Je dis tout simplement que, moi, j'ai dû jeûner pour comprendre. Chacun ses méthodes. C'est tout.
- Le jeûne serait, donc, un humanisme ?
- Non. C'est surtout un acte "seul", qui ne demande aucune justification. Il se fait, point.
- Te voilà, brusquement, agressif.
- C'est normal. Il est 21h 00 : j'ai mangé.


Labels:

Monday, September 01, 2008

Ramadan ouvre ses bras

Premier jour du ramadan. C’est férié : on fête les travailleurs en Amérique du nord. Le reste du monde les fête le 1er mai. Mais nous sommes spéciaux. Nous sommes américains (du nord).

Il fait très beau. Je prends mon vélo et roule sur la rue Hochelaga. Métro Préfontaine, je tourne à droite et je continue jusqu’à la rue Ontario. Je vire à gauche. C’est une longue rue qui traverse une bonne partie de Montréal. Mais elle a des allures de ruelle dans ce quartier. Des gens assis sur des chaises devant un magasin. Une petite pharmacie. Un magasin « tout à un dollar ». Je sens la moindre odeur de bouffe. PFK, McDonald, Pizzéria. Rien ne m’échappe. J’ai faim. Mais pas si faim que ça. C’est psychologique. Enfin, c’est ce dont je me convaincs.

Un boucher arabe. Je rentre. Ça sent la Harira. Cette fois-ci, j’ai vraiment faim, point d’illusion. « Elle sera prête vers 15h00 », me lâche-t-il. Il a l’œil jaune et les cheveux légèrement gras. J’achète trois ou quatre petites bricoles et je lui promets de revenir pour la soupe. Avec une casserole. Il faut se ravitailler. Je reprends mon vélo et me dandine dans la rue. Quelle belle journée. Pourquoi n’a-t-il pas fait aussi beau pendant tout l’été ? La vie est injuste.

J’ai toujours faim. Et je me dis toujours que c’est psychologique. Dans la rue, quelques ventes de garage. Je m’arrête de temps en temps, deux ou trois minutes. Je cherche quelque chose à acheter pour les encourager, ou simplement pour faire une petite jasette. Mais je ne trouve rien à acheter : ils ne vendent rien qui se mange !

Quand je rentre chez moi, il est à peu près 14h. Je suis en sueur. Je jette un coup d’œil sur mes courriels. Rien à signaler. La presse. Rien à signaler. Skype, il n’y a personne. Je me mets devant la télé et regarde un match de tennis. Vénus Williams se balade contre une adversaire que je ne connais pas. Je devrais me mettre à jour côté tennis. Lendl ne joue plus, Sampras a pris sa retraite et Federer n’est plus numéro un mondial. J’ai du pain sur la planche.

Je reviens chez le boucher vers 16h00. Je suis en vélo. « Heureusement que tu arrives maintenant. Elle n’était pas prête à 15h00 ». Je souris. Je ne vais quand même pas lui dire que je savais. Je savais que 15h00 marocaine (il est marocain) est à peu près 16h00 canadienne. Pas de hasard, juste des statistiques.

J’ai une cocotte-minute remplie de Harira dans une main et l’autre main conduit, tant bien que mal, le vélo. Je me rends rapidement compte que monter une pente avec une cocotte-minute de Harira, devrait être déclarée discipline olympique. Je me trouve drôle, ridicule. J’aime cette sensation de ridicule. J’imagine les passants qui doivent rire à pleine gorge de moi. Je me trouve encore plus drôle.

Le coucher du soleil est à 19h 32. J’attends.

Il est 19h 45. J’ai déjà englouti un bol de Harira, deux dattes, deux chbbakias, un verre de jus et la moitié d’une assiette de Spaghettis. Qui dit mieux ?

Bon Ramadan !

Labels: