Saturday, December 15, 2007

Oncle Sam. The journey (7)

Je viens de recevoir ma valise. Un jour après mon arrivée. Il fait soleil. Un soleil doux d’automne qui vous rassure et vous met le sourire jusqu’aux oreilles. Les petites sont en vacances : Thanksgiving. Demain, On est invités chez des amis de mon oncle et sa femme. Un couple avec deux enfants. Il est Français, elle est Américaine.

Nous sommes demain et nous allons chez P. et C. Il fait gris. Pas vraiment l’idée romantique que je me faisais du Texas. L’autoroute nous grignote. Elle est vaste, large, Américaine. Quarante-cinq minutes plus tard, nous sommes arrivés. Au dessus de la porte, une pancarte en bois qui dit : S., le nom de famille de P. Je lance à mon oncle : il est Suisse, lui, non ? Oui. En effet. Comment tu sais ?

Quand on entre, il y a plusieurs personnes, des femmes, des hommes, des gosses qui courent partout. Ça parle français et anglais. Une grande bibliothèque nous accueille au fond du salon. Des bandes dessinées. Il me faudra un bon vingt minutes, me présenter, faire un tour aux toilettes, scruter des détails ici et là, avant de comprendre : P. est un collectionneur de BDs. Il en parle avec enthousiasme et chaleur : il aime ses bandes dessinées. C’est un passionné. J’aime les passionnés.

Il y a quatre couples en tout. À part mon oncle et sa femme, P. et C., il y a deux autres couples Français. Tout le monde travaille pour des compagnies pétrolières. Tous les hommes. La plupart des épouses n’ont pas encore le permis de travail. C’est le cas de la femme de mon oncle qui ne s’en réjouit pas trop. Bientôt se joint à nous le voisin, dont la femme était déjà présente. Elle a accouché 9 jours plus tôt. On ne dirait pas. Souriante, grande, vivante. Il n’y a pas une seule trace de fatigue ou d’épuisement. Je suis impressionné. Puis, c’est au tour de C. de m’impressionner : elle parle très bien français. Je suis facilement impressionnable finalement. Quoique. Des Américains qui parlent une autre langue, si bien, on n’en trouve pas à chaque coin de rue…

La bouffe est bonne, la discussion joviale et pleine d’anecdotes. P. et mon oncle avaient travaillé ensemble à Paris. Leur mémoire collective fourmille de petites histoires drôles qu’ils nous racontent. On sent qu’ils se sont bien amusés. On sent aussi l’amitié, au-delà des gestes et des mots, elle est là. Et c’en est presque gênant d’être avec eux, ici, et de les écouter parler de leur passé commun.

J’ai bien mangé.

Les enfants jouent dehors. Ils avaient mangé avant nous. Le trampoline les fascine, les excite. Ils rient fort, se dépensent sans retenue et, surtout, sautent comme j’aurais aimé sauter au basket. Mes jambes n’ont rien d’un trampoline.

Il est temps de jouer au tennis. Ils viennent de le déclarer. Je les vois courir partout. Leur tenue est irréprochable : les shorts, les raquettes, les chaussures. Tu veux jouer ? Non, merci. Je suis facilement impressionnable.

Le voisin Américain joue bien. Le service, le revers à deux mains, le jeu de jambes, tout est là. Mais il y a mieux en face. Elle est maigre, maigre, maigre. Mais tape la balle fort, fort, fort. Et avec précision. Le revers est irréprochable, le coup droit, etc. Et elle fait le tout sans le moindre effort. Elle a du métier.

J’ai fini par jouer. En jeans. De tous les services de notre Graff nationale, je n’ai retourné qu’un seul. Le reste au filet. Heureusement que je joue avec le voisin, il cache bien mes faiblesses.

C’est fini. On revient en voiture, eux en sueurs, moi en demi-sueurs. On parle de Federer et Sampras. Justement, ils viennent de jouer deux matchs d’exhibition au Japon. Les deux gagnés par Federer. Mais le deuxième à l’arrachée. Je lance la question : Federer est-il le meilleur de tout le temps ? Je ne suis pas contre. Mais reste Roland Garros. Et Agassi les a tous gagnés, les grands Chelems. Alors ? Je ne sais pas. Ça n’est pas si évident que ça. (Le lendemain, je saurai que Sampras a gagné le troisième match. Ils ont dix ans de différence et Sampras a pris sa retraite depuis un certain temps). Au milieu de nulle part, comme un cri contre l’injustice, je lâche cette phrase, certes justifiée, mais un peu hors sujet : J’aimais Ivan Lendl.

On se remet à table pour discuter. P. nous parle d’un certain V., français qui a travaillé avec lui et certaines des personnes présentes, ici aux États-Unis. J’ai l’impression qu’on parle de François Pignon (Le dîner de cons, L’emmerdeur,…). Monsieur composerait un numéro, taperait sur le clavier pendant que ça sonne, oublierait qu’il avait composé un numéro, puis dix minutes plus tard, parlerait au répondeur sans savoir qui il avait appelé. Euh, Stéphane, non, Alain, en tout cas, cher ami, rappelle-moi…Nous avons ri de bon cœur. P. nous a même amenés un CD avec ces morceaux d’anthologie gravés, pour appuyer ses dires.

Ma cousine m’appelle pour venir dehors. Me voilà sur le trampoline. Les enfants sautent. Ils viennent au milieu, un après l’autre, et font un saut « spécial ». Ils sont beaux et joyeux. Ils parlent anglais et français, simultanément, sans y réfléchir. L’avenir est sur le trampoline. Je descends dix minutes plus tard. J’ai mangé, moi. Je ne peux pas survivre longtemps sur ce dangereux engin.

Les invités commencent à quitter. L’un après l’autre. On se salue, on se souhaite une bonne soirée. 24 heures, ce n’est pas assez pour une journée. Mille ans entiers ne seraient pas suffisants à connaître assez de gens, à se raconter assez d’histoires. Mille ans au complet ne suffiraient pas pour apprendre tout ce qu’il y a à être appris.

C’est fini. On revient en voiture, cette fois vers la maison. On est fatigués, silencieux, les mots sortent au compte-gouttes. Je pense à P. et C., à leur accueil chaleureux, à leurs histoires drôles, à leur façon pragmatique d’éduquer leurs enfants (on en a eu quelques aperçus). Je garderai un doux souvenir d’eux et de cette soirée en général.

Les filles dorment dans la voiture. Le trampoline n’est pas un sport sans conséquences.

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At 16/12/07 2:57 PM , Anonymous Anonymous said...

Salut Onassis,

Tranches de vécus agréables à lire.
Là, je vais te taquiner:-), tu n'as rencontré que des "Américains" qui parlaient anglais? Tu as fait quoi de la majorité hispanique:-)? Je vois que tu n'as pas pris trop de taxis:-), moi j'ai baragouiné en amharique deux fois en taxi. Et je te parle pas du jour ou le conducteur m'a dit: look around you we're all Mexicans. Je trouve ce pays fascinant de par sa population.
Mwah

 
At 16/12/07 3:19 PM , Anonymous Anonymous said...

Bien entendu, et comme tu le sais ;), je parlais des américains dont la langue maternelle est l'anglais...Et c'est vrai, j'ai pris zéro taxis !
C'est vrai, they're all Mexicans !

 
At 17/12/07 2:27 PM , Blogger Blanche said...

Sympathique, douce lecture en ce soir de 'blizzard' à Paris! (-2°, quand même...) Merci, Onassis!

 
At 17/12/07 5:12 PM , Blogger Onassis said...

Merci Blanche.
Appelle ta soeur et demande-lui de te parler de notre belle tempête de neige AUTOMNALE de la fin de semaine. Je n'ai pas de mots pour la décrire.

 
At 18/12/07 6:42 AM , Anonymous Anonymous said...

Toujours aussi agréable de te lire. A cause de toi, je vais rêver de voyage et d'Amérique toute la journée ;-)

 
At 18/12/07 2:02 PM , Blogger Blanche said...

Elle m'en a déjà parlé! Même qu'à cause du mètre 40 de neige, elle n'a pas pu aller à un entretien d'embauche en ville!
Ca a intérêt à se calmer d'ici mars, ou je ne vais pas voir mes neveux!:)

 
At 18/12/07 2:20 PM , Blogger Onassis said...

Sarvane : Tu veux dire "grâce à moi" :)

Blanche : pas 1m 40, 40 cm, 1m 40, on serait vraiment ensevelis. Ça va sûrement se calmer. Mais c'est imprévisible. Elle est à Québec, c'est ça ?

 
At 22/12/07 2:24 PM , Blogger Blanche said...

Quoi, c'est pas un mètre 40? Alors là je suis déçue...
Oui, elle est bien à Québec:)

 

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