La plus haute fleur de la nature
Deux désespérés se sont explosés à Casablanca aujourd'hui. Encore. Ça a commencé à Casa. Ensuite Alger. Ensuite Casa. Que se passe-t-il ? Pourquoi ? Comment ? Les questions pleuvent, mais ça reste sec question réponses.
Il y a l'été qui arrive. Et le plus beau pays du monde (slogan choisi par le Maroc pour atteindre les 10 millions de touristes d'ici 2010) attend ses touristes. Le mot "touristes", ici, englobe deux catégories de gens. Les Européens, Américains, Canadiens, etc. Et les gens comme moi. Exilés en Europe ou en Amérique du nord. Que veulent faire les terroristes ? Peut-être dissuader la première catégorie de touristes de venir. C'est très intelligent, vous voyez. Les touristes désertent le Maroc. Les vendeurs de babouches passent leurs journées à suer devant leurs magasins vides et à chasser des mouches qui s'ennuient, les travailleurs de l'industrie hôtelière chôment, traînent dans les rues et remplissent les cafés déjà pleins, les bars...restent pleins. Car nous le savons tous, ce sont les Marocains eux-mêmes qui remplissent les bars. Mais ça, c'est une autre histoire...Et alors ? Alors d'autres désespérés. Alors d'autres chômeurs. Alors d'autres fils du peuple qui n'ont rien à perdre. Il faut recruter, voyez-vous. C'est une économie en pleine expansion...
Ensuite, il y a les élections qui arrivent en Septembre. Semons la terreur. Et que les gens votent pour nous. Car nous sommes la loi. Nous sommes la seule voie.
Le Maroc fait peur ces temps-ci. Les touristes comme moi, iront de toutes les manières au pays. Il faut voir ses parents. Il faut se baigner dans les plages qu'on a fréquentées pendant sa jeunesse. Il faut manger du boulfaf et boire du thé à la menthe à longueur de journée. Il faut nourrir sa nostalgie. C'est comme ça. On revient toujours à son pays d'origine. On revient toujours à son enfance. Mais les autres ? Ils iront probablement en Tunisie. Ou pour s'éloigner du Maghreb et de la folie de ses habitants, ils vont aller en Italie, en Espagne, en France, etc. Qui est le grand perdant ? Le Maroc. Le Maroc. Le Maroc. Alors pourquoi font-ils ça ? Ils sont désespérés ? Des désespérés, il y en a à la pelle dans les pays du tiers-monde. Ils ne se tuent pas pour autant. Ils défendent une cause ? Dites-moi donc laquelle. La Palestine ? L'Irak ? L'Afghanistan ? Foutaises. En quoi la mort triste d'un Marocain au centre-ville de Casablanca sert-elle une quelconque cause ? Même si c'est le consulat des États-Unis qu'on visait. Les États-Unis, c'est un empire. Un grand méchant loup. (Et une culture fascinante. Et un beau pays - j'imagine -, et une civilisation intéressante. Avec ses bons coups et ses bas coups. Mais ça, c'est une autre histoire aussi) Le méchant loup a les dents très longues. Très très longues. Et le ventre plein. Et l'estomac qui grandit de plus en plus. Ce n'est pas un attentat dans son consulat qui le fera reculer. Ce n'est pas un kamikaze tiers-mondiste, mort dans son propre pays, tuant ses propres frères, qui le fera réfléchir. Non. Au contraire. Ça justifie(ra) ce qu'il fait déjà ailleurs dans le monde. Continuez, et le Maroc, deviendra un état militaire. Continuez. On ne récolte que ce qu'on sème.
Cette mode de se tuer au nom de causes farfelues et mal définies gagne de plus en plus de terrain dans ce monde. Surtout chez nous, les musulmans. (La minorité folle, et prête à tout, fait payer la majorité paisible et pacifiste) Le terrain est fertile dans les pays musulmans. La pauvreté, les inégalités sociales toujours grandissantes, la dictature (tolérée par l'occident car bénéfique) longue et pénible (pour les citoyens du pays) de ses dirigeants, l'agression permanente des forces de ce monde (inutile de citer des noms ici), la mondialisation agressive et peu respectueuse des réalités des pays et de leurs cultures, font en sorte que dans chaque ville, dans chaque quartier (très) défavorisé dans nos pays, il existe des cibles potentiels, d'éventuels terroristes, prêts à combattre. Combattre quoi, combattre pourquoi, ils ne le savent souvent pas : ils ont faim, sont analphabètes, ont une colère sourde (bientôt moins sourde) en eux, et estiment généralement que leur pays n'a rien fait pour les aider à s'en sortir. Ils sont dans la marge de la société. Pourquoi la respecteraient-ils alors ? Pourquoi épargneraient-ils cette élite, qui mange et boit à sa faim, sans se soucier d'eux, les oubliés de la société ?
Reste que rien au monde ne justifie le meurtre d'innocents. Et quand je dis meurtre, j'inclus suicide. N'est-il pas un meurtre ? Un kamikaze, ne s'enlève-t-il pas la vie ? Je prétends qu'il n'a pas le droit. Car sa famille, ses voisins, son pays, ont besoin de lui. Car nous avons tous besoin de lui, de sa jeunesse, de ses mains, de son cerveau. Et là est peut-être la clé pour sortir de ce guêpier : valoriser les personnes. Leur expliquer, leur faire sentir qu'on a besoin d'eux et qu'ils ne sont pas inutiles. Ce n'est pas, là, un défi simple, j'en conviens. C'est un énorme challenge. C'est même un idéal. Mais n'est-ce pas d'idéal dont on a besoin dans une réalité de plus en plus difficile à contenir, à cerner, à guider vers de meilleurs cieux ?
Je me permets une citation de Jean Jaurès :
Qu'est-ce que l'idéal ? C'est l'épanouissement de l'âme humaine. Qu'est-ce que l'âme humaine ? C'est la plus haute fleur de la nature.
En espérant des lendemains meilleurs.
En espérant qu'en été, je ne vivrai pas de drame dans mon cher Maroc.
Labels: L'idéal, Terrorisme
Tu as bien raison, Onassis; ce qui se passe est révoltant et ça fait mal... essentiellement aux Marocains.
Alors, il ne faut pas déserter ce très beau pays, et faire en sorte que son tourisme (des 2 sortes, comme tu dis) continue à grandir. Car il y a encore beaucoup de richesses à découvrir au Maroc!
Oui, c'est dramatique. Et je comprends que cela te touche autant, Onassis.
Une citation fort intéressante dans les circonstances...
Blanche : Toi qui y as été, tu ne le sais que trop bien que le Maroc est un pays qui gagne à être connu...
Sarvane : Ça me touche tellement. Je n'y ai connu que la paix. Et voilà que maintenant...
Kennza : Bienvenue et merci.
Je me méfie de Jaurés depuis que Sarkozy se réclame de lui :) et bon courage avec ta maîtrise.
Red@ : C'est de Sarko qu'il faut se méfier puisqu'il se réclame d'un mort qui ne peut se défendre :)
Merci.