Écrivain méchant
La Presse. Sur une page, un titre : Danger, écrivain méchant. Sur une autre page, un autre titre : Crawford utilise le botox. La vie est faite de contradictions. De suite de scènes, allant du burlesque au touchant. La vie est banale. La vie est intrigante. La vie est tout et rien. Et nous en sommes les marionnettes. Ou les malheureux protagonistes. Danger, un écrivain méchant. Ça m'intéresse. C. utilise le botox. Qu'est-ce je m'en fous ! Elle pourrait se mettre du beurre rance sur le troisième cil de l'oeil droit que je trouverai ça tout aussi insignifiant. Mais écrivain méchant, ça, c'est du matériel.
Chacun ses intérêts dans la vie.
Mais qui est cet écrivain méchant ?
Je l'ai connu à travers Les mots des autres. Et je l'ai respecté. Belle plume. Belles histoires. Et un courage. Et une dignité. Et une singularité qui sort du lot. Quand Lepage et Tremblay émirent leurs opinions controversées (sic) sur la souveraineté, VLB leur sauta au cou et les condamna publiquement. Extrémiste. Je l'ai trouvé extrémiste et impulsif. Ce n'est pas pour autant que j'ai discrédité l'écrivain. Les mots des autres, c'est toujours aussi bon. Pourquoi ne le serait-ce pas ? Ce sont toujours les mêmes mots, la même poésie, la même histoire d'un homme qui aime la littérature, qui aime les livres, que ce soient les siens ou ceux des autres.
Voilà qu'il nous sort cet essai annoncé depuis 33 ans sur James Joyce. Car VLB fait partie de cette infime partie des gens (dont je ne suis pas membre) qui encense Ulysse. Ou plus exactement, qui a compris Ulysse. Je dois vous avouer que je suis encore à la 600ème page. Et que je ne comprends pas grand-chose. P'tite tête que je suis. P'tite tête avec peu d'intelligence. VLB, lui, a compris. Et quelques uns dans ce monde. Fante le citait dans un des ses livres. Et d'autres. Comme mon ancien prof, devenu ami depuis, Ivan, qui trouve que c'est le meilleur écrivain du 20ème siècle. Demandez à n'importe quel orgueilleux intello s'il a lu Ulysse. Il vous dira que oui. Ne lui demandez pas, ensuite, de vous en faire le résumé. Surtout pas devant tout le monde. Attention, je ne suis pas en train de vous dire que tous les gens qui comprennent ce que raconte Joyce sont fous ou prétentieux. Je vous dis juste qu'ils sont rares. Tellement rares que, des fois, il faudrait s'en méfier.
Revenons à nos moutons.
L'article nous dépeint VLB exactement comme je l'imaginais. Provocateur. Particulier. Peu con. Un homme dans le vrai sens du terme. Un homme avec des poules, des chiens, une ferme. Amoureux authentique de la littérature. Un homme qui dort 4h par nuit, se réveille tôt, écrit, puis prend soin de ses animaux. Un homme dont l'affiche de la propriété dit : Attention, écrivain méchant. Un homme avec qui on voudrait prendre une bière et discuter. En s'attendant à ce que, de temps en temps, il nous énerve et qu'on veuille lui foutre un coup poing sur la gueule. Un vrai homme, vous savez ? Pas un homme programmé. Pas un homme qui suit des règles ou des conventions. Pas un homme prévisible. Non. Un homme respectable.
L'article me laisse rêveur. Si j'avais à écrire un livre avec, comme protagoniste, un écrivain, je l'aurais imaginé comme ça. Exactement comme ça. Vivant en campagne. Avec des animaux. Une pipe. Une barbe hirsute. Disant des énormités de temps à autre et les assumant. Écrivant de bons et de moins bons livres. Vivant de sa plume. Vivant de son cerveau. Loin des cons. Victor-Lévy Beaulieu est un personnage finalement. Et j'aime les personnages.
Tous les hommes trébuchent. Tous ceux qui sont vrais. Les autres, on s'en fout. Je respecte VLB.
VLB! Une institution! Une ancienne flamme lointaine m'avait donné en cadeau Jos Connaissant! J'ai beaucoup aimé. J'ai détesté son Essai-Poulet sur Kérouac. Race de monde, téléroman, j'ai suivi cela avec assiduité. Cormoran m'a laissé froid. J'ai apprécié au plus haut point une série radio très originale à Radio-can que VLB a tenue autour de Ferron. J'ai été frappé par
l'appel presque paranoïaque de la littérature qu'il a ressenti en lisant dans la tasserie de la grange ou le grenier, je ne sais plus. J'ai suivi avec grand intérêt les billets très libres qu'il a écrits un temps pour Le Devoir. Un jour, il a confié à ses lecteurs qu'il allait aux framboises (sauvages)flambant nu! Je suis heureux de constater qu'il est très bien reçu chez les jeunes écrivains (voir par exemple le blogue de Maxime Catellier). Bref, ce faiseur de mots et de langues est très impliqué dans la culture rurale du Québec et, bien sûr dans l'édition et la littérature! Prendre une bière avec le prolifique auteur? J'ai un ami écrivain, décédé à présent, qui a déjà pris une brosse avec VLB. Il ne m'en a pas rapporté beaucoup de bien. Mais c'était jadis. Mais il fallait lire entre les lignes.
Ah jadis. J'ai l'impression d'être né à la mauvaise période !!
Onassis, je ne crois pas qu'il ait un âge d'or. Il y a seulement le temps que l'on se raconte les uns aux autres.
Tu vois, comme ça, ça ferait un bon début de poème.
Il n'y a pas d'âge d'or
Il y a le temps qu'on se raconte
Les uns aux autres
Il y a les romans qu'on a pas écrits
Les arc-en-ciels qu'on n'a pas vus
Les nuages qu'on n'a pas vécus
Les cieux qu'imaginer, on n'a pas pus
...
enfin, malgré la faiblesse de ces vers, il y a matière à "tripper"...
J'ai attribué par erreur Cormoran à LVB alors que l'auteur est Pierre Gauvreau. Je voulais parler de Bouscotte dans le cas de VLB.
Jacques, je te pardonne :)