Wednesday, November 26, 2008

À Paris, le dimanche 26 octobre 2008

Pendant ce temps-là, ma cousine faisait une sieste à l’hôtel.

Je descends la pente qui mène à l’hôtel tout en lâchant mes yeux à droite et à gauche. Nous somme dimanche. Les dimanches en France sont un peu moroses : les magasins ferment leurs portes, les cloches de cathédrales sonnent, les passants se font rares. C’était le cas il y a 14 ans quand je vivais à Nancy. C’est encore le cas aujourd’hui, à Paris, par ce dimanche certes gris, mais rafraîchissant. Rafraîchissant parce que je suis quand même à Paris et que je n’y ai pas été depuis 1998. Rafraîchissant parce que je respire l’Europe, avec ses petites rues « dallées », avec ses petits bistros, avec son étrange empreinte historique qu’on voit à chaque coin de rue. Rafraîchissant parce que, finalement, ça sent l’histoire, le temps. Ça sent différent de l’Amérique du nord, où tout est grand, immense, neuf, presque sans odeur.

Je cherche un cybercafé. Je suis accro à internet. Et je n’en suis pas particulièrement fier.

Pendant ce temps-là, ma cousine faisait une sieste à l’hôtel.

Mais voilà qu’une petite surprise m’attend au coin de la rue. Un petit bouquiniste tout mignon, tout accueillant, est ouvert. Ne sommes-nous pas dimanche ? Oui. Mais les bouquinistes, les marchands de légumes, les cafés, les cybercafés (justement), ce n’est pas pareil. Ce n’est pas les Champs-Élysées. C’est un autre monde. Et c’est tant mieux comme ça.

Je rentre et respire religieusement l’odeur des pages jaunies. C’est presque le paradis. C’est silencieux. C’est le désordre. C’est beau. Je flâne une bonne demi-heure à chercher, à flairer, à jauger des livres. J’en prends trois, dont un que je ne connais ni d’Ève ni d’Adam. Seul son titre m’inspire : Tokyo.

Pendant ce temps-là, ma cousine faisait une sieste à l’hôtel.

Je m’approche de la caisse pour payer et me hasarde à poser la question qui me brûle les lèvres : vous n’avez pas « Le livre de l’intranquillité » de Pessoa ? (Toujours cette foutue manie de poser des questions à la négative. Pour ne pas être déçu. Pour me protéger contre le NON. Va savoir pourquoi !). La dame, mi-austère mi-polie cherche dans sa base de données et me dit tout doucement, tout gentiment :
- Si, si…
- Pourtant, je ne l’ai pas aperçu sur vos étagères !
- Ah bon ?

Elle se lève, cherche, cherche. Ne trouve pas. S’en va « en arrière », derrière des rideaux mauves qui cachent une pile énorme de livres. Elle s’adresse à un autre monsieur. Et voilà, il lui tend un livre et elle revient vers moi.
« Le livre de l'intranquillité ». Plastifié. 11 euros. Ça coûte 54 dollars canadiens à Montréal. Je prends !

Je paye avec ma carte de crédit et sort tout heureux dehors.

Je reviens vers l’hôtel.

Plus rien à foutre de gmail, facebook et compagnie. La vie est ici. Entre mes mains. Dans ces pages jaunes. La vie est ici. Me couvrant de ses bras. Dans ces rues presque désertes de Paris. La vie est ici. Dans ce monde merveilleux, plein de surprises, de déceptions, de naissances et de morts, comme un fleuve long et peu tranquille, tantôt paisible, tantôt houleux avec au bout, quelque chose qu’on ne sait pas. Ou rien. Qui sait ?

Je reviens vers l’hôtel.

Car, pendant TOUT ce temps-là, ma cousine faisait une sieste à l’hôtel.

Et maintenant, je n’ai qu’une envie : la réveiller. Qu’on aille gambader ailleurs…


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At 26/11/08 4:19 PM , Anonymous Anonymous said...

Le plaisir est une notion personnelle qui flotte sur les vagues de l'imagination.
Cordialement

 
At 1/12/08 9:47 AM , Anonymous Anonymous said...

napping is fun! :-)

 
At 4/12/08 7:57 PM , Blogger simo s no man land said...

thank s for your kind words...
merci pour les voyages de ces textes illumines ,par tant d effigies et splendeurs de ta muse.
keep up ,bro.

 

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