Mon pays, ce n'est pas un pays, c'est...
Je suis allé sur le blogue d’Amine. Maroc Underground. Voyons voir ce que c’est. Et ça m’a sauté au visage. Un jeune peuple. Une fougue. Une envie de faire la révolution. Des filles qui chantent du métal. Des jeunes qui font du hip-hop. Reda (leader du groupe Hoba Hoba Spirit et créateur du très drôle Zakaria Boualem de telquel) qui pose les questions qu’il faut, avec la rage qu’il faut. Et je ne sais ce qui m’est arrivé. J’ai eu les larmes aux yeux. La chair de poule. Carne tremula. Les yeux qui piquent. Tout le tralala. Cette fraîcheur. Cette envie de s’en sortir. Et bien sûr, comment ne pas se le dire, moi qui suis ici. Moi qui suis parti. Moi qui ne me suis battu pour rien. Moi qui ne les ai pas aidés.
La plupart du temps, je me convaincs. Qu’il n’y a qu’une vie. Qu’une vie c’est court. Qu’il fallait faire un choix. Et que maintenant il faut l’assumer. La plupart du temps, je n’ai aucun remords. J’aide mon pays natal à ma façon. Que je n’expliquerai pas. Mais des fois, ça me revient. Quand je vois ce à quoi je ne participe pas. Ce à quoi je n’ai pas participé. Ce à quoi je ne participerai jamais. Cette jeunesse rebelle, courageuse, opiniâtre, émouvante. Très émouvante. Je m’en mords les doigts. Mais la vie est faite de choix, qui sont rarement évidents.
Mais revenons au documentaire. Que peut-on en tirer ? Les remarques des interviewés sont intéressantes. Pas de juste milieu. S’occidentaliser ou se faire pieu. Aucune autre option. Entendons-nous : je ne suis pas là pour donner mon avis sur le heavy métal ou le hip-hop. Je ne suis pas un fan. Ou je le suis. On s’en fout. C’est la liberté qui nous importe. De jeunes citoyens incarcérés parce qu’ils font du heavy metal. On ne parle plus d’un pays de droit. On ne parle plus d’un pays. On ne parle plus de citoyenneté. On ne parle plus finalement. On ramasse ses bagages et on s’en va. Et ils s’en vont. En grande quantité. Et je suis parti. Pourquoi un pays traite-t-il si mal ses citoyens ? Parce qu’il est entre le feu et le feu. L’intégrisme en nette progression. L’Amérique en grand juge. Et l’économie qui a besoin de ces juges. Aussi corrompus ou peu objectifs soient-ils. Alors le pays, pour l’appeler ainsi, prend des décisions farfelues, contradictoires. Fait une chose et son contraire. Et le peuple de schyzophréniser, de ne plus savoir sur quel pied danser, de ne plus savoir s’il a le droit de danser.
Pourtant notre liberté s’arrête où la liberté des autres commence. Pourtant, en chantant dans un parc, loin des pieux et des sages, loin des gens qui n’aiment pas ce qu’on chante, on ne brime la liberté de qui que ce soit. Au mieux, on fait de la critique sociale. Au pire, on crie tout simplement. Crier son désarroi, crier de plaisir ou de douleur, ça ne peut qu’être enchanteur. Ça ne peut qu’être libérateur. Ça ne peut qu’être mieux que de (se) jeter (en) des bombes sur de pauvres innocents.
Une mention à Achkayne, le jeune groupe de hip-hop. J’ai écouté une de leurs chansons et faire un son pareil, dans un appart. Chapeau. Mille chapeaux.
Vive les jeunes. L’avenir est à vous. L’avenir est vous.
Touchant.
navrant...
"Je m’en mords les doigts. Mais la vie est faite de choix, qui sont rarement évidents."
C'est peut-être ça, la rançon de l'exil. C'est un autre courage, celui de partir et de tout quitter. Qui te parle de lâcheté ne sait pas ce qu'il aurait fait dans ton cas.
T'en fais pas.