Wednesday, October 31, 2007

L'identité



Je ne sais pas pour vous, mais moi, je vois un lien entre le couronnement de Dégénérations comme chanson populaire de l'année 2007 au gala de l'ADISQ et le cirque des accommodements raisonnables.

À méditer.

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Sunday, October 28, 2007

Au bonheur des ogres




Je n'avais jamais lu Pennac. Je le regrette.

Il y a d'abord le style dégagé, avec de l'humour et de l'imagination à en revendre. Il y a Malaussène, ce personnage auquel, très vite, on s'identifie. Il y a les autres : Julius, le chien malade; la maman partie en vadrouille; Clara, la boulimique photographe; tante Julia qui-n'est-pas-tante-pour-deux-sous, etc. Et puis, il y a les références littéraires. Jean Potocki et son "Manuscrit trouvé à Saragosse" (qu'un jour j'ai devoré). Carlo Emilio Gadda et son "Affreux pastis de la rue des merles", qui trône dans ma bibliothèque (qu'un jour j'ai commencé, mais j'ai manqué de courage!). Il y a tout ça et c'est déjà beaucoup (Que dire des idées subtilement de gauche de Malaussène ? Rien. Restons dans la retenue...).

Je me suis retrouvé chez moi, confortable dans cet univers délicieusement rafraîchissant et drôle.

"Au bonheur des ogres " est le premier d'une trilogie. Je me suis empressé d'acheter les deux suivants : " La fée carabine " et " La petite marchande de prose ". Sur la première page de l'un des deux, un hommage à un écrivain que j'admire. Ça disait quelque chose comme ça : A John Toole Kennedy, mort de ne pas avoir été lu.

Pennac, si tu veux bien, désormais nous serons frères.


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Monday, October 22, 2007

Loobish

I remember us.

Sharing music all the time. Writing/guessing lyrics, singing or, at least, pretending to. Sad eyes, sad hearts, strangers in our own country.

I remember our smiles, our tears. I remember our hugs. We were alive. We were struggling but alive.

I remember.

You were my friend. I loved you to death. You loved me to death.

I left. Tears. Bitter hearts. Bitter smiles. You came to my place. You cried. I tried not to. I did not cry. Not physically. I did inside. And it was burning. And the invisible smoke. And i swallowed little pieces of glasses. Invisible glasses. As invisible as truth, love, soul. All concepts that we know but we never saw, that we feel but never touched.

You were my friend.

You will always be my friend.

I remember us.

We were young and full of life.

We're still full of life, are we not ?


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Sunday, October 21, 2007

Brièvement

J'ai été contre la surmédiatisation de Jaziri, contre le fait qu'il prenne (mal) la parole au nom des musulmans, contre son intolérance et ses idées farfelues.

J'ai été contre tout ça.

Mais Amnistie internationale parle de risques réels de torture en Tunisie.

Mais c'est un père de famille...

Mais je n'ai jamais voulu sa déportation.

Je lui souhaite bonne chance...

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Wednesday, October 17, 2007

Moi*, la poutine et Mac-Tro


Mi-ramadan. Un vendredi. Ça m’est venu comme ça : j’ai eu envie d’une poutine . C’était le gala de la XXX, la compagnie pour laquelle je travaille. Nous sommes allés danser ensuite. En descendant de la voiture, vers minuit moins vingt, j’ai aperçu un magasin Mac-Tro (pour les intimes). J’en ai eu tout de suite l’eau à la bouche. Leur poutine n’est bien entendu pas la meilleure, mais dans le royaume des aveugles, le borgne est roi. C’est quoi le rapport O. ? C’est clair. La poutine du Mac-Tro est la borgne dans le royaume des vraies poutines. Un dessin avec ça ?

Je me suis dirigé directement vers la porte de l’estimable succursale d’alimentation rapide. J’ai ouvert la porte. Enfin, c’est ce que je voulais faire. Elle n’a pas bougé d’un pouce. Fermé ? Oui. À 23h 30. Non seulement, ils mettent des produits chimiques dans leur viande, mais en plus ils se permettent d’être ponctuels. Je la veux ma poutine moi !
Je baisse la tête et avance. Je n’y peux rien. Ce n’est pas Lwazzani ici. Je ne peux pas demander gentiment qu’on me fasse une dernière poutine, parce que j’ai atrocement faim, que ma cousine est malade et que le chien de mon voisin n’arrête pas de japper de la nuit. Non. Je ne peux pas. C’est l’Amérique ici. On ferme à 23h30. Paf. Dans la gueule.

Nous sommes allés au Rouge. J’étais le seul gars avec quatre jeunes filles. Dès que j’allais aux toilettes, un troupeau de body-buildés, bleachés, rasés de plus près venaient aborder mes collègues. Dès que je revenais…bein, ils restaient là. C’est l’Amérique ici. Et puis, qu’est-ce que j’en avais à foutre. J’ai siroté mes Perrier-citrons tranquillement, l’un après l’autre, en faisant semblant de reconnaître des chansons dont je n’avais jamais entendu parler. Bleachés se déhanchaient. Body-buildés poussaient. Rasés de plus près faisaient du lipsink. Siliconées ne faisaient rien. Il suffit d'être dans ce cas-là...J’ai passé une bonne soirée. Même si je n’arrêtais pas d’imaginer la délicieuse poutine que j’allais dévorer à 3h 30 du matin avant de me coucher. Une poutine, ça doit rassurer, avant une journée de jeûne, non ? L'avenir nous le dira.

À 3h, tout le monde dehors. Plus d’alcool. On est à Montréal, pas à Madrid. R. me propose de me raccompagner, ainsi que deux autres filles. J’accepte. Arrivé sur le coin de la rue F. et O., je vois la lumière du Mac-Tro national de mon quartier briller dans le noir. Mon oasis. Ma bouée de sauvetage. Mon avenir. R., tu peux me laisser ici. Je la veux la poutine. Je la veux. Je la veux. Je la veux.

Quand je rentre, il y a une dizaine de jeunes saouls qui viennent prendre leur ration d’anti-vomitifs dans leur cher Mac-Tro. Ils sont attablés devant leurs frites et hamburgers. Il y a du sel partout sur les tables. C'est la pagaille. Mais ça sent bon. C'est le bordel. Mais je la veux ma poutine. Je fais la queue. Trois personnes sont en avant de moi. Le premier a une cigarette éteinte sur les lèvres. On dirait que dès qu’il va attraper son cheeseburger et ses frites, il va courir dehors pour allumer sa clope. C’est si addictif que ça, la cigarette ? La deuxième personne tient péniblement debout. Ses yeux convergent vers le milieu de temps en temps, elle les replace et replace sa mèche orange verdâtre en même temps. Une fois, deux fois, trois fois. Dommage que je n’aie pas une paire de ciseaux sur moi. La troisième personne est un jeune garçon de 13-14 ans. Il a l’air fatigué. Des cernes. Des cheveux sales. Il est pâle. Je regarde autour de moi et je ne vois aucune personne susceptible d’être son parent. Que fait-il là à cette heure tardive de la nuit ? Est-il seul ? A-t-il été kidnappé ? Je suis sur le point de composer le 911, quand une dame légèrement bedonnante sort des toilettes, s’approche de lui et lui demande tout de go : Pis, ça arrive-tu ces patates frites ?

Victime des nouvelles sensationnelles. LNC. TSQ. TAV. MdeJ. Allez vous faire foutre. Vous vous infiltrez quand même dans ma tête, y a rien à faire.

Arrive mon tour. J’ai du mal à parler tellement j’en ai l’eau à la bouche. Une fontaine. Je vais prendre un trio Big-Sac et à la place des frites, je prendrai une poutine. Il n’y a pas de poutine aujourd’hui. Ils font exprès ou quoi ? Je sais, je n’aime pas le Mac-Tro. Je sais, je n’arrête pas de parler contre eux, dans leur dos, de leurs produits chimiques, de leurs litres de coca, de leurs frites douteuses, de leur ketchup, mayonnaise, moutarde, pain enrichi, de leurs millions de profits et du salaire dérisoire de leurs employés. Je sais. Mais aujourd’hui, je viens en traître. J’ai besoin de ma poutine. Vous pourriez quand même faire un effort, non ? Faites comme si je n’avais jamais rien dit.

Okay. Je prendrai le trio Big-Sac. Avec un thé glacé, pas de glaçons.

Je monte la pente de ma rue, tout en mangeant mes frites. Un homme au pantalon agrémenté de quelques tâches de sang cute s’approche de moi. Je l’attends. Je ne suis pas dangereux, je ne suis pas dangereux. Même si tu l’étais, c’est un peu trop tard maintenant. Tu es là. Et la pente. Et je ne prends pas de stéroïdes. Et puis, j’veux les manger ces frites, moi. C’est correct, je t’attends vieux. Comme avait dit Tarik Bnou Ziad : La mer est derrière vous et l'ennemi devant vous. Vers où s'enfuir ? (traduction libre de l'arabe au français d'une traduction non moins libre du berbère à l'arabe) Il veut aller à Sherbrooke. Sa blonde est malade. Il a consommé. Je lui tends un dollar et m’apprête à partir, quand il m’attrape par la main et me dit : il me manque seulement onze dollars pour partir. J’arrête de manger mes frites et le regarde dans les yeux. Tu t’attends quand même pas à ce que je te donne onze dollars, non ? En plus, z’ont même pas de poutine au Mac-Tro, ce soir !

Je reprends mon chemin. Les frites ne sont pas très bonnes. Je suis déçu.
Quand j’arrive chez moi, le Big-Sac a refroidi. Je suis contre le micro-ondes. Je n’ai donc pas de micro-ondes. Je le mange tel quel. J’ai encore faim. Mais il est 4h du matin. le temps d’aller se coucher. Et faire de beaux rêves. Mais mes rêves ont un seul et même thème : la maudite poutine. J’en rêve toute la nuit. Et le lendemain. Et le surlendemain.

Hier, au Lafleur du carré St-Louis, j’ai pris une poutine moyenne. Ou dois-je dire une moyenne poutine ? Parce que, je veux que vous le sachiez, elle était très bonne. Je l’ai mangée en marchant vers chez moi. Pour brûler les calories. (Mon œil. Le mien, pas celui de la deuxième personne du Mac-Tro, celle dont les yeux convergeaient. Enfin...). Sur mon lecteur MP3, Buena Vista Social. Je ne sais comment vous décrire ça, mais écouter nos amis Cubains chanter de leur voix mélancoliquement heureuse des chansons sans âge, en mangeant de la poutine richement grasse sur la rue Sherbrooke en me dirigeant vers l’est (la direction est importante ici), est une expérience unique. C’est comme manger un Big-Mac, avec un t-shirt arborant l’image du Ché, des lunettes Ray-Ban et un ruban-rose-sida.
C’est unique.
Bizarre.
Incohérent.

Je m’en fous.

Je l’ai finalement mangée ma poutine.

Engloutie même.

* : Le narcissisme n'a pas de limites.


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Tuesday, October 09, 2007

Le dîner du con



Samedi soir. 18h 30. J’engloutis en un temps record, une soupe (Harira en sachet), des pâtes faites à la sauvette, un verre de lait, un verre de jus, des dattes, une ou deux chbakyas achetées au kilo chez un boucher douteux de la rue St-Laurent et un morceau de Baba, gâteau polonais que je chéris depuis quelques mois. Je zappe. Il n’y a rien à voir. Comme d’habitude. 18h 55. Je zappe toujours. TV5. On annonce le prochain programme : Dans quelques minutes, 3950, Luck Mervil reçoit ses invités. Je vois le nom des invités. Il y a un musulman avec un tarbouche blanc. Un imam. Non. Dites-moi que ce n’est pas lui ! Oui. C’est lui. Imam Jaziri. Ou appelez-le, imam tout-le-monde-rit (de-nous).
Ok. On va regarder ça.

Le concept de l’émission est simple. On invite des personnes de confessions différentes et on débat de tout et de rien.

Je recommence.
Le concept de l’émission est simple. Vu que le débat sur les accommodements raisonnables bat de son plein partout au Québec, on invite des personnes de confessions différentes et on parle des sujets qui sont sur toutes lèvres des citoyens du Québec.

Je recommence.
Le concept de l’émission est simple. Vu que le débat sur les accommodements raisonnables et sur la place des musulmans dans la société québécoise bat de son plein, on invite des personnes cools de toutes confessions et un musulman con comme ses pieds et on démontre sa connerie tout le long de l’émission.

Je ne recommence pas. C’était ça.

Les invités ?
- Max Gros-Louis : un chef Huron de Wendake, près de Québec.

- Julius Grey et sa conjointe, l’avocate Lynne Casgrain: Julius est un avocat québécois spécialisé dans les questions de libertés indivuelles. Il se démarque par son expertise en droit constitutionnel et en droit de l’immigration. Il est fils d’une famille polonaise juive mais pas pratiquant de la religion juive. Je ne connais pas grand-chose de sa femme, mis à part sa parenté avec feu Marie Thérèse Forget Casgrain ex-sénatrice Canadienne, connue pour son féminisme et surtout pour avoir dirigé le mouvement pour le vote des femmes au Québec, avant la Première Guerre Mondiale. Son implication commence en 1921et la victoire est atteinte en 1940 (Wikipédia).

- L’imam Saïd Jaziri : Ceux qui vivent au Québec le connaissent. Un grand bouffon avec une taguiya blanche et rien en dessous.

- Shabad Saroop Singh Khalsa : un Sikh québécois converti. Aucune information sur lui sur le net ou, du moins, je n’ai rien trouvé.

- Raymond Gravel : Prêtre et député québécois. Il s’est prostitué tout jeune et a travaillé dans un bar homosexuel. A été une escorte masculine à 16 ans. Et, je cite Wikipédia, Il est controversé en raison de son appui au mariage homosexuel et à l’avortement, deux positions contraires à celles de l'église catholique.

Quant à Luck Mervil , c’est un acteur, chanteur, souverainiste, engagé un peu partout pour des causes assez respectables (même si je ne les partage pas toutes). Dans le débat sur les accommodements raisonnables, il est, grosso modo, connu pour être contre le port des signes religieux en public, position, si on doit croire les sondages et les interventions des citoyens lors du dit débat, largement partagée par les citoyens du Québec.

Les invités arrivent à l’heure du dîner, dégustent l’apéritif tout en faisant connaissance l’un de l’autre. C’est Luck qui invite.

D’emblée, Jaziri se plante. Il refuse de s’asseoir à une table où l’alcool serait servi. Luck l’accommode. L’alcool est servi dans la cuisine. Ceux qui en veulent se servent et en boivent là-bas. Shabad ne prend pas d’alcool. Sa religion lui interdit toute substance toxique, mais que les autres boivent à table ne le dérange pas. On l’aime.

Raymond Gravel souligne ce manque d’ouverture de Jaziri dès le début. Tu m’obliges à ne pas boire à table, moi je ne t’ai obligé à rien. Il a raison. Je suis d’accord.
Ensuite, on parle du voile, de l’égalité des sexes et de tous les autres sujets brûlants - au Québec - ces temps-ci. Jaziri se défend tant bien que mal, jusqu’à ce que Julius le reprenne : vous donnez une image idéalisée du monde musulman. Dans la majorité des pays musulmans, les femmes ont la vie dure. Puis vient le sujet clé de la soirée : les homosexuels. Est-ce que la religion musulmane les accepte ? Non, dit Jaziri. Ils sont dans le tort. Et ils le savent. Il dit aussi que les deux autres religions monothéistes ne les acceptent pas non plus. Mais qui est en face de lui ? Julius Grey, un juif non-pratiquant, qui milite depuis longtemps pour les droits de la personne. Il n’a bien entendu rien contre les homosexuels. Raymond Gravel, n’en parlons même pas, je l’ai déjà présenté. Shabad dit qu’il n’a rien contre eux non plus. Luck Mervil ? Bein voyons. Je vous l’avais déjà dit, il est pour toutes les causes. Et Jaziri de s’enfoncer, de parler de maladie et de guérison. Il a l’air fou. Il l’est d’ailleurs. Mais un fou dans une table d’équilibrés, a l’air encore plus fou. Un peu plus et on l’internerait. Julius Grey déclare que la religion musulmane devrait emboîter le pas des autres religions et accepter les homosexuels. Le verdict est tombé.
Luck Mervil prend sa guitare et nous fait une chanson infantile pour détendre l’atmosphère.
Ça finit là-dessus.

Mon problème ?
C’est très simple. Si tu invites Jaziri, tu invites un rabbin tricoté serré et un prêtre « normal ». Mais inviter cette bibitte ambulante qui, et prenez ma parole pour du cash, nous fait faire l’autruche, à moi et à tous mes amis musulmans, dès qu’on la voit apparaître à la télé avec un juif non-pratiquant et un prêtre connu pour ses positions trop ouvertes par rapport à l’église catholique, vous m’excuserez, mais ça pue. Ça pue, puis pas à peu près. Je connais une horde de musulmans qui se serait assise à cette table, mon cher Luck, qui n’aurait rien trouvé à dire contre les homosexuels, qui aurait non seulement accepté la présence du vin sur la table, mais en aurait allégrement dégusté. Je ne dis pas que c’est ça qu’il faut faire. Je ne suis pas là pour donner mon opinion. Je dis seulement que ton échantillon est loin d’être représentatif, mon cher Luck. Ton émission était biaisée. Il y eut verdict avant le jugement. Et ça me désole de la part du gentil citoyen que tu veux être/paraître.

J’ai beaucoup d’autres exemples comme ça. On invite des intellectuels juifs, chrétiens, athées, agnostiques à débattre avec un rugbyman, judoka, chanteur de Raï, etc. musulman. Toutes les fois que j’ai assisté à ces débats, j’ai eu envie de casser la télé, crier sur mon balcon, assassiner quelqu’un, ou plus précisément l’animateur ou le producteur de l’émission en question.

Je suis violent ? Je sais…je suis musulman. Donc, homophobe, macho, borné, batteur de femmes, terroriste, ignorant et accessoirement violent. Car il faut de la violence pour avoir toutes ces qualités.

Que la manipulation des médias continue. Que le cirque continue. Mais ne soyons pas surpris du supposé choc culturel qu’on vit chaque jour. Il est bâti à grands coups de mauvaise information, de mauvaises émissions, de faux sondages et j’en passe.

D’ailleurs, je croyais que tu étais farouchement contre les accommodements raisonnables des immigrants, Luck. Alors, pourquoi avoir accommodé Jaziri au détriment de la majorité ? Ça me rappelle une histoire de cabane à sucre en Montérégie

La réponse est simple : il fallait bien la faire, ton émission. Il fallait bien démontrer sournoisement la connerie (énorme, j’en conviens) du con. Il fallait bien que tu nous chantes ta p’tite chanson à la noix de coco, à la fin, et qu’on te regarde, béats et hébétés en nous disant : Quel homme, ce Luck. Ouvert d’esprit. Souverainiste. Acteur. Chanteur. Humaniste. Quel homme, vraiment !

À trop vouloir démontrer la connerie d’un con fini, on finit par l’être.




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Monday, October 08, 2007

Brièvement, Jacques et Ernesto me pardonneront


Ernesto Guevara : Mort assassiné le 9* octobre 1967 en Bolivie. Personnage mythique mais controversé, adulé par les uns, honni par les autres. Sa légende persiste.




Jacques Brel : Mort d'un cancer au poumon (par arrêt de l'arbitre, dirait-il) le 9 octobre 1978 en France. Principalement chanteur, mais aussi comédien et réalisateur, l'un des meilleurs auteurs-compositeurs de sa génération et peut-être (selon moi, il n'y a aucun doute là-dessus) de tous les temps. Sa sensibilité sans bornes, sa drôlerie unique et son sens de la dérision, ont fait de lui une référence dans le monde de la musique, même 30 ans après sa mort.

Malgré leurs défauts, connus ou confidentiels, sur lesquels je ne m'étalerai pas aujourd'hui, je respecte pronfondément ces deux hommes. Car au delà des défauts, il reste ces qualités rares qu'ils possédaient et cette énergie, vitale à ma propre quête, qu'ils m'ont parfois insufflée durant les trente premières années de ma vie.

Hasta siempre !

Tôt ou tard, on arrive...

*: Corrigé grâce à la rédactrice chauve.



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Monday, October 01, 2007

Ni ces départs, ni ces navires, ni ces voyages qui nous chavirent



Je t’ai connue sur la rue St-Catherine. Pas dans la rue. Non. Nous travaillions pour la même compagnie. On mettait nos casques sur la tête et en avant la musique. Un appel après l’autre. J’appelais pour X raison. Tu appelais pour Y raison. Puis, un jour, la compagnie a décidé de fusionner nos départements. J’étais sur René-Levesque. Tu étais sur St-Catherine. Je suis arrivé un samedi matin et je ne t’ai pas vue. On ne voit jamais les gens quand on ne les connaît pas. C’est aussi simple que ça. J’ai fait une erreur dans un des dossiers. Tu l’as rapportée à ma boss. Et c’est comme ça que je t’ai connue. Quand je t’ai appelée par ton prénom, grande fut ta surprise.

Quand je t’ai parlée la première fois, j’ai tout de suite su qu’un jour, tu serais mon amie.

Le temps a passé. On a encore déménagé. Métro Atwater. Tu arrivais le samedi matin avec La Presse. Tu me passais la section Actualités et tu commençais par la section Cinéma. Ensuite, on s’échangeait les sections, une par une. Et le temps passait plus rapidement. Un jour, j’ai su que tu faisais du théâtre. Tu as adapté un livre de ce ravi de bison. J’étais ravi de chez ravi. J’aime cet écrivain. Je l’aime beaucoup. Surtout qu’il chantait. Surtout qu’il était ingénieur. Surtout qu’il était génial. Et que le génie, on n’en trouve plus nulle part. Je t’ai tiré les vers du nez et tu m’as parlé de tes rêves. Cette fois, c’est moi qui étais surpris. Dans cette foire de coincés, parmi ces noyés du désert, voilà une artiste rêveuse, dont le cœur bat. Des vrais battements. Avec palpitations, pulsions, titillements et yeux qui clignent. Je t’ai aimée. Un amour amical. Un amour vrai. De ceux qu’on croit éternels. Mais rien n’est éternel.

Nous mangions des fois ensemble. Nous péchions souvent par vanité. Les gens, on les trouvait stupides, sans goût, drôles sans le vouloir, ignares sans le savoir. Et on se le disait. Les yeux dans les yeux. À voix basse. Le sourire jusqu’aux oreilles. On se le disait et on riait. Et c’était notre petit champ secret, notre petite bouffée d’air dans un univers trop formaté, trop rigide, trop monotone. J’ai voulu venir voir tes pièces. Tu étais gênée. Tu m’as dit que tous les billets étaient vendus. Je me suis résigné à attendre. La prochaine saison. Pour toi, je pouvais attendre.

Le temps a passé. Jour après jour. Samedi après samedi. Journal après journal. De temps en temps, on parlait de films, de livres, d’art. Tu étais mon amie. L’une des rares au travail.

Le temps a passé. Jour après jour. Samedi après samedi. Client après client. Et j’ai postulé ailleurs. J’ai eu le boulot. Et je suis parti. Sur la carte que vous m’avez tous écrite, tu avais laissé un doux message : À bientôt mon ami. Et vive l’art ! Tu étais mon amie. Alors, on a décidé de se voir autrement, de se voir ailleurs. On est allés au restaurant une première fois, une deuxième fois, une troisième fois, etc. J’ai fait le figurant dans un de tes court-métrages. On est allés au théâtre ensemble. On se voyait quand on pouvait. Et c’était chaque fois plus plaisant. Tu me parlais de tes histoires de cœur, de tes angoisses. Je te parlais des miennes. Et c’était presque pareil. Nous sommes nés le même jour. À quelques années de différence.

Un jour, on s’est dit que oui, il était temps qu’on fête notre anniversaire ensemble. Oui. Cette année. L’année de mes trente ans. Cette année. Une année-clé dans notre amitié toujours plus forte, toujours plus belle.

J’ai fini par aller te voir jouer. Première pièce. L’adaptation du bison ravi. Son univers cynique et drôle, triste et romantique, intelligent et léger à la fois. Tout était là. J'ai vu les scènes du livre défiler devant mes yeux. Et j’ai eu des frissons. C’était bien. Je t’admirais. Tu travaillais de jour. Tu répétais le soir. Quand tu prenais des vacances, c’était pour jouer. Une vraie artiste. Jusqu’au bout de tes rêves. Jusqu’au bout de tes forces.

Je suis allé te voir jouer encore une fois. Deuxième pièce. Un scénario qui sort tout droit de ta tête. Tes angoisses. Tes peurs. Tout était là. Je te voyais jouer. Je voyais tes émotions. Je voyais ton cœur au-delà de tout le reste. Je voyais ton âme. C’était bien. Avant d’entrer, j’ai jeté un coup d’œil sur le pamphlet. Dans un coin, sur une des lignes, j’ai cru rêver. Il y avait mon nom. À mon ami le poète…..J’étais aux anges. Déjà que tu me cites, c’était quelque chose. Que tu m’appelles poète, c’était vraiment beaucoup. Mais, ne pas me le dire. Le faire sans m’en dire un mot. Et si je n’étais pas venu voir la pièce ? Je ne l’aurais jamais su. La classe. La vraie classe. J’étais par terre. Je t’aimais. D’une amitié profonde.

Le temps a fait son petit bout de chemin. C’était bientôt l’anniversaire. Le nôtre. Le tien et le mien. Le mien et le tien. On allait le fêter le lendemain. J’en parlais à nos amis communs. On devait aller à un restaurant sur Duluthain. Trois jours avant le jour Jain, on était une dizaine à avoir confirmain.

Le dimanche, jour J. Je rentre au travail et je trouve ton message. Le dîner est annulé. Comme excuse, tu me disais brièvement que G. n’avait pas pu se libérer. Niaise excuse, voilà ce que je me suis dit dès que j’ai lu ce maudit message. Et puis, pourquoi ne m’as-tu pas appelé ? Et pourquoi ne m’as-tu pas écrit sur mon courriel personnel ? Ça ne sentait pas bon. Ça chlinguait. Je t’ai écrit, en te demandant directement et sans y aller par six chemins, la vraie raison. Tu m’as répondu : tu n’avais pas aimé que j’invite d’autres personnes que tu ne connaissais pas, à ta soirée. Je t’ai répondu : je n’organisais pas cette soirée. Je ne me rappelais pas avoir invité qui que ce soit. Et c’était aussi ma soirée à ce que je sache. Tu ne te rappelais plus ? On est nés le même jour. À quelques années de différence.

Et c’était le vide.

Je suis rancunier. C’est mon plus grand défaut. Je n’oublie jamais. Je n’oublie pas. Quand on me dit « Dieu pardonne ». Je dis « Oui, justement, je ne suis pas Dieu ». Je suis rancunier. Et très orgueilleux. Mais la vie est courte. Et l’amitié est chère. Trop chère pour s’envoler comme une vulgaire feuille d’arbre vieillie par un automne chétif. C’est ce que je me disais ce jeudi soir en préparant mes pâtes aux champignons et poivrons, recette top-secret par ailleurs, qui a fait des envieux même au fin fond de Leningrad. C’est ce que je me disais, quand j’ai pris le téléphone et je t’ai appelée. J’ai laissé un message te demandant de me rappeler, car je voulais te voir. Pas de réponse. Le vendredi matin, je t’ai appelée du bureau. À ton bureau. Tu ne savais pas que c’était moi. Tu ne m’as pas reconnu. Ou tu as fait semblant. Je m’en fous. Je t’ai demandé de tes nouvelles. Et puis, quand est-ce qu’on se voit pour se dire les vraies affaires ? Tu m’as balbutié des banalités. Que tu étais très occupée. Que tu ne savais pas. Mon orgueil en a pris un coup. Ou mille coups. J’avais mal. Et je ne voulais que raccrocher au plus vite. Ce que je fis en t’entendant me dire, avec ta voix de comédienne, que tu m’appellerais bientôt. Bientôt. Dès que les poules seraient revenues de chez le dentiste.
J’ai failli m’évanouir au travail. S. me demanda ce que j’avais. Je ne sais ce que j’ai raconté comme connerie. Ma tête tournait. J’étais hors de moi. Les ennemis qui te donnent des coups, tu les prends, tu cries, tu pleures et ça s’en va. Les amis qui te donnent ne serait-ce qu'un coup, tu le prends et tu le gardes et un jour ça sort. Et c’est une tumeur, un coup de poing ou l’indifférence. Et c’est cette dernière la pire.

Je t’ai revue quelques semaines plus tard. Nous avions un cours ensemble. Je t’ai saluée poliment. Et la politesse est l’ennemie des amis. C’est froid et sans goût. Et c’est tout ce que j’avais sur moi. La journée est passée vite. Enfin, aussi vite qu’elle pouvait. Le temps n’y peut rien, quand l’atmosphère est lourde et les nuages triomphants. À la fin, un vague bye bye et me voilà dehors à marcher et à réfléchir. Un chanteur algérien avait dit « le cœur qui t’aime, moi je le brûle ». Ou un truc comme ça. J’ai décidé de brûler mon cœur. Et je l'ai brûlé.

Je t’ai vue ce vendredi dernier. On ne s’est pas parlé. Ce n’est pas de ta faute. Ni de la mienne. C’est notre amitié. On la croyait forte. On la croyait capable de résister à la vie et ses pièges. Elle était forte. Mais pas assez.

Je t’ai vue vendredi. Furtivement. Ne pas te parler m’a fait mal. Mais te parler poliment m’aurait fait encore plus mal. Alors, voilà. Le silence est d’or. Ou d’argent. Enfin, il y a pire.

Je te souhaite de réussir. Je te souhaite de l’art par les oreilles et par les narines. Je te souhaite des planches, des caméras, des rideaux et des applaudissements. Je te souhaite l’amour et les berceaux, et des amitiés fortes, très fortes, qui ne s’émiettent guère pour le moindre invité de plus, le moindre restaurant de trop.

Je te suivrai. De loin. De très loin. Et tu voleras sûrement. Car tu rayonnes. Malgré tout.

Quand je t’ai parlée la première fois, j’ai tout de suite su qu’un jour, tu serais mon amie.

Ce que je ne savais pas, c'est qu’un autre jour, tu ne le serais plus.

On n’oublie rien de rien. On s’habitue, c’est tout.

Photo : Composition de Belkacem Tatem



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